Hitler peut ressusciter
L’une des premières lectures qui m’ont marqué à vie, je l’ai faite au début de mon adolescence, quelque part au milieu des années 1980.
Un jour, je suis tombé, dans la bibliothèque d’un de mes oncles, sur une trilogie au titre sensationnel, La vie fantastique d’Hitler, de Giulio Ricchezza.
Même jeune, je savais, ne serait-ce qu’à travers les films de guerre, qu’Hitler était un monstre! Alors qu’avait-elle d’aussi fantastique, la vie d’un tel démon?
Or, en dévorant ces trois tomes, j’ai constaté que le récit de leur auteur italien n’avait rien d’une apologie du nazisme. Giulio Ricchezza a plutôt disséqué historiquement l’ensorcellement de l’Allemagne par le mal.
À travers ce parcours d’Hitler vers la conquête du pouvoir, très jeune, j’ai compris que le mal le plus terrifiant, le plus abominable peut facilement infester les âmes des plus stoïques des humains.
Cette lecture m’a rempli d’effroi. Plus je tournais les pages, plus je saisissais l’annihilation de cette Allemagne du début du XXe siècle, plus la peur m’habitait!
Il y a presque un siècle, cette Allemagne humiliée par les vainqueurs de la Première Guerre mondiale, un pays à genoux à qui on avait imposé une dette colossale, a fini par succomber à l’appel d’un désaxé enragé, Hitler.
Il aura suffi d’un homme en colère, un seul homme avec une haine inouïe envers ses voisins, les vainqueurs, et qui a trouvé sa cible : les Juifs.
Pour couler les fondations d’une théorie simpliste, un homme seul au début des années 1920 a ainsi bâti une théorie du complot infernale.
Pour Hitler, le Juif est devenu l’incarnation de tous les malheurs de l’Allemagne de l’époque. Ce monstre a faussement convaincu ses compatriotes que le Juif s’enrichissait sur le dos du pauvre Allemand blanc, qu’il était dépourvu de tout sentiment nationaliste et qu’il ne pensait qu’aux siens, les autres Juifs.
À force de discours haineux, grossiers et populistes, l’Allemagne des années 1920 et 1930, l’une des sociétés les plus raffinées de toute l’histoire de notre humanité, accablée par la crise économique et humiliée par les vainqueurs, a cédé aux nazis.
Toutes proportions gardées, un nouveau type de nazisme primaire semble conquérir, aujourd’hui, les cœurs de plus en plus d’Occidentaux. Les sondages récents sont, à ce titre, éloquents. La peur de l’autre s’empare de plusieurs pays occidentaux, même les plus aisés, comme les pays scandinaves.
Presque un siècle après, en Occident, le Juif d’hier est devenu tantôt l’immigrant, tantôt le réfugié, tantôt le musulman d’aujourd’hui.
Jusqu’où cette montée de l’intolérance ira-t-elle?