Le vrai crime de Rémy Couture
Avertissement : Cette chronique est destinée à un lectorat adulte et averti. (C’tu correct, votre honneur?)
Je me protège. Mais, ç’a l’air que ce n’est plus suffisant, mettre un avertissement. Rémy Couture le sait maintenant. Rémy, c’est le gars qui fait trop bien sa job. Un spécialiste en maquillage d’horreur. Quand je dis maquillage, je ne parle pas d’une cicatrice style Jean Coutu à l’Halloween. C’est le genre de gars qui rend une série comme Walking Dead aussi bonne et aussi réaliste qu’elle l’est. Picasso est à la peinture ce que Couture est au sirop de maïs. (C’est à partir du sirop de maïs qu’est fait en général le faux sang.)
«Corruption de mœurs». C’est ça son crime. C’est sur l’article du Code criminel relatif à ce méfait que la Couronne se base. En gros, la définition de quelqu’un qui corrompt les mœurs est la suivante : «Toute personne qui produit, imprime, publie, distribue, met en circulation ou a en sa possession aux fins de publier, distribuer ou mettre en circulation, quelque écrit, image, modèle, disque de phonographe ou autre chose obscène.» OK. Ben faudrait alors arrêter tous ceux qui ont une Bible en leur possession.
Soyons sérieux deux secondes. On accuse Rémy d’inciter le public aux violences qu’il met en scène. Ben voyons. Y’a pas plus déviant, violent, cruel, obscène que les supplices infligés au cours des siècles où l’Église était à son plus fort. C’était all dressed! Excrément, mutilation, écartèlement, insertion d’objets qui n’ont rien à voir avec un dildo rose bonbon avec un dauphin bleu à la base. La maladie mentale et, surtout, la répression des désirs engendrent des actes obscènes. Pas un dude qui fait des faux moignons en latex.
«C’est pas juste ça; c’est les scénarios violents et les scènes de viol qu’il crée!» Ah OK. As-tu vu le film High Tension? Va louer ça. Il est bien en évidence chez Vidéotron, dans la section Horreur. Dans la scène d’intro, on voit une vieille camionnette toute croche avec un gros monsieur au volant. On l’entend répéter : «Ah oui, c’est bon.» Puis on voit rapidement sa main, qui tient le derrière de la tête d’une demoiselle en pleine action. Puis, hop! on le voit sortir le bras par la fenêtre, tenant une tête décapitée dans sa main, et la laisser tomber. La camionnette s’en va. Gros plan sur la tête de la fille par terre. Une fellation avec une tête coupée! Où sont les artisans, producteurs, réalisateurs de ce film? Au chaud à compter leurs sous.
Dans le fond, son crime, à Rémy, c’est qu’il est atteignable. Il n’est pas protégé par une méga-boîte de production hollywoodienne, ni le Vatican. C’est un gars qui a regardé des films d’horreur dans son enfance et qui s’est dit : «Je pense que je serais bon là-dedans : du sang qui gicle, pis tout.» Il y avait un marché, il a répondu à l’appel. Je lui souhaite de tout cœur que ce marché l’appelle. Courez-lui après, producteurs de gore, donnez-lui de la job à pu’ finir! Ce serait la meilleure réponse possible. L’industrie de l’horreur qui dit haut et fort : «On n’a pas peur.»
Les opinions exprimées dans cette tribune ne sont pas nécessairement celles de Métro.