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Quand MBC défend Trump

CHRONIQUE – Il est parfois particulier, sinon inopportun, de faire grand cas des propos – même outranciers – d’un chroniqueur. Parce que si celui-ci assure un rôle névralgique à même nos démocraties, la pertinence du refus de l’amalgamer avec le sujet – nommément le ou la politique – demeure.

Or, toute règle comporte une exception, selon l’aphorisme. Mathieu Bock-Côté en est une. Du fait de multiples facteurs, dont une verve, une éloquence et une omniprésence médiatique, l’opiniâtre commentateur est devenu, ici comme en France, l’un des militants les plus influents de notre époque. Au point où l’on assiste, depuis quelque temps déjà, à la bockcotéisation du Québec. Suffit d’un œil sur le narratif public afin de s’en convaincre.

Plus particulièrement, sa mainmise sur le lexique employé par le gouvernement Legault ou le Parti québécois est, pour peu qu’on s’y intéresse, spectaculairement manifeste.

Qui, parmi les chroniqueurs de la nation, a vu l’un de ses bouquins être chaleureusement suggéré par le premier ministre? Un hasard? Ne soyons pas naïfs.

Bock-Côté refuse la reconnaissance du concept de racisme systémique en sol québécois? Idem pour la CAQ et le PQ.

Bock-Côté rejette le concept de «féminisme intersectionnel», lui préférant celui, inodore, du «féminisme universel»? Idem pour la CAQ et le PQ.

Bock-Côté refuse toute responsabilité du peuple québécois quant aux ravages des pensionnats autochtones, jugés comme faute fédérale seulement? Idem pour la CAQ et le PQ.

Bock-Côté suggère la conservation du «mot en N» dans l’espace public? Idem pour la CAQ et le PQ.

Bock-Côté transpose la panique morale américaine à même les universités du Québec? Idem pour la CAQ et le PQ.

Bock-Côté s’obsède du chemin Roxham et de la fermeture des frontières? Idem pour la CAQ et le PQ, ce dernier allant jusqu’à proposer, burlesquement, l’envoi de la Sûreté du Québec afin d’intercepter les réfugiés. À la question de journalistes à savoir ce que ladite SQ ferait ensuite, le chef du PQ, incapable de répondre à la question, réplique plutôt: «Vous n’agissez pas ici en journaliste, mais bien en militant!» Tiens, tiens…

D’aucuns croiraient d’ailleurs, à entendre les discours récents de PSPP, que MBC en assure les retouches. Dans son dernier point de presse, il affirme: «On a tenté dans ce débat-là [i.e. Roxham] d’extrême-droitiser les personnes qui pensent que les frontières sont, blablabla […]. » Qui, déjà, nous annonçait que «l’extrême-droite est un concept fantomatique»? De moins en moins subtil, côté ventriloque. 

S’ajoute à cela la (longue) liste des volte-face de St-Pierre Plamondon, toutes en néo-conformité avec les diktats idéologiques de Bock-Côté, dont quelques illustrations se retrouvent ci-haut.

MBC n’est point, en bref, un simple analyste politique. Plutôt un militant féroce qui, du fait de sa stature d’incontournable, tire maintes ficelles du débat public.

Qui, à part lui (et quelques-uns de ses acolytes médiatiques), peut se permettre d’inviter ses lecteurs à prendre leurs cartes du PQ? Leur dire qui appuyer à la course à la chefferie? Personne.

***

Vendredi dernier, un copain m’envoie un audio: «Écoute ça, t’en reviendras pas, MBC affirme que Trump est victime de persécution politique.»

J’écoute ipso facto. Le pote a raison. On y entend même: «Je vais peser mes mots: Trump est victime de persécution politique.»  

Bouche bée.

Et s’il n’avait pas pesé ses mots, ç’aurait été quoi? Que Trump est victime de racisme anti-Blanc?

La méfiance de Bock-Côté pour l’État de droit et les droits fondamentaux (sauf la liberté d’expression, si elle le concerne) est bien connue.

Qu’il fasse sien l’illibéralisme d’Orban laissait déjà pantois.

Qu’il appuie ouvertement la candidature d’Éric Zemmour, lui qui promettait d’expulser de la France cinq millions d’hommes et femmes et d’interdire les prénoms autres que «français», même effet.

Mais qu’il embarque dans le train des coucous, blâmant la partisannerie afin d’expliquer les accusations, au nombre de 34 (!), d’un grand jury new-yorkais envers l’un des plus grands bandits des temps modernes repose, spectaculairement, sur le rejet complet d’un paradigme jusqu’alors non négociable: celui de l’application d’une seule loi pour tous, en tout temps.

Ce type de raisonnement, mortifère à tout État de droit et donc démocratie, donne froid dans le dos. Surtout quand on connaît la liste, interminable, des prochaines accusations à être portées contre l’ex-président [1].

En espérant que cette fois, l’influence de MBC se butera enfin aux portes du politique québécois, gardées par la règle de droit et autres sens de la Justice. Celle avec un grand J, pierre d’assise du contrat social.

[1] https://www.theguardian.com/us-news/ng-interactive/2022/feb/07/donald-trump-list-legal-cases?fbclid=IwAR0mSYdkGfkbWUVCPhdVz9ZxelS-O6e05f3McHy-dE7VzirQ8FGSQhSw3Hg

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