Le Pont des espions
Si vous ne croyez pas que la guerre, sous toutes ses formes, peut crétiniser tout un peuple, allez voir le film Le Pont des espions.
N’ayez crainte, mon billet ne vous dévoilera pas l’intrigue, car le génie de Steven Spielberg amène le public au-delà du fait historique; cet échange d’espions entre les Américains et les Soviétiques, alors que la guerre froide atteignait son paroxysme.
Dès le début, un espion soviétique tombe entre les mailles du FBI. Pour avoir un semblant de procès juste, on lui a désigné un avocat pour défendre l’indéfendable, au milieu d’une meute qui ne réclame que vengeance. La potence!
C’est fascinant de voir comment le peuple américain, ses institutions et ses autorités sombrent facilement dans les méandres de la haine, alors qu’un seul homme se tient debout.
Cette relation nouée entre cet avocat magistralement joué par Tom Hanks et son client, un espion soviétique qui, dans l’ombre, nuit aux siens et planifie leur mort, est d’un humanisme au-delà des capacités moyennes des humains!
Après le procès de cet espion soviétique, un espion américain tombe entre les griffes des Soviétiques. Tout à coup, on est pris au piège. Qui est qui?
Aussi banal que cela puisse paraître, si un espion est pour ses ennemis un traître, il est pourtant le héros des siens. Et vice-versa! C’est à travers ce questionnement existentiel, loin du tout blanc ou du tout noir, de la lutte entre le mal et le bien, que le génie de Spielberg nous met face à la contradiction de ce qu’on croit être notre certitude, la vérité!
Dans les camps américain et soviétique, l’adage «là où il y a de l’homme, il y a de l’hommerie» prend toute sa signification. Même cette dualité traître/héros n’a plus de sens, car quand le héros est pris dans les filets de l’ennemi, les siens le larguent. Ils finissent par succomber à la peur de celui qui s’est fait prendre et la honte qu’il dévoile tout aux «autres»!
Puis, que dire de ces scènes où des ennemis tentent, tant bien que mal, de maintenir des canaux de communications secrètes pour éviter le pire? Un dialogue absurde, mais qui finit par se nouer grâce à des êtres au-dessus de la normale, dans les deux camps.
Là, la vérité est sortie de la bouche de l’espion soviétique, car pour survivre à la tempête, il faut juste avoir la force de «se tenir debout» pour défendre ses convictions!
D’ailleurs, ce qui réconforte dans ce film, c’est que l’humain est partout pareil. Qu’il soit bercé dans un régime glacial ou dans celui supposément du respect des droits et des libertés, sa bêtise n’a pas de limites, mais sa grandeur non plus!