Une tempête anti-Bolsonaro après ses propos sur les feux en Amazonie
Des images impressionnantes de feux de forêt en Amazonie ont déclenché une tempête virale sur les réseaux sociaux tandis que le président brésilien Jair Bolsonaro insinuait que des ONG avaient provoqué les incendies.
Le président d’extrême droite s’en est pris aux ONG au lendemain de la publication de statistiques faisant état d’une progression alarmante des feux de forêt au Brésil, tout particulièrement en Amazonie.
Lundi, Sao Paulo (sud-est), première métropole du pays, avait été recouverte en plein après-midi d’un nuage noir apparemment dû à des feux de forêt à des milliers de kilomètres de là.
Sur Twitter, le mot-clé #PrayforAmazonas (Prions pour l’Amazonie) était la première tendance mondiale mercredi à 15H40 GMT, avec 249 000 tweets.
De nombreux internautes s’indignaient en postant des photos et vidéos montrant des pans entiers de forêt dévorés par des rideaux de flammes.
«Seize jours que la forêt amazonienne brûle et personne n’est au courant», déplorait un internaute. «Notre maison brûle et nous regardons ailleurs», s’indignait un autre.
Mais certains internautes mettaient en garde contre des images qui seraient anciennes.
Il n’était pas possible d’évaluer mercredi l’ampleur des superficies affectées par des feux de forêt en Amazonie.
«C’est la guerre»
Le mot-dièse était également en haut du classement sur le réseau social au Brésil, suivi du hashtag «ONGs», suite aux déclarations de Jair Bolsonaro.
Le président a insinué que des ONG pourraient avoir provoqué les incendies afin d’«attirer l’attention» sur la suspension par Brasilia des subventions à la préservation du «poumon de la planète».
«Il pourrait s’agir, oui, il pourrait, mais je ne l’affirme pas, d’actions criminelles de ces ‘ONGéistes’ pour attirer l’attention contre ma personne, contre le gouvernement brésilien. C’est la guerre à laquelle nous sommes confrontés», a lancé le chef de l’Etat devant des journalistes à Brasilia.
Les feux de forêt ont augmenté de 83% depuis le début de cette année au Brésil par rapport à l’ensemble de 2018, a annoncé mardi l’INPE, un institut officiel. La hausse a été particulièrement alarmante dans les états occupés en totalité ou partiellement par la forêt amazonienne, comme celui du Mato Grosso (centre-ouest), avec 13 682 départs de feu (+87%).
Jair Bolsonaro n’a apporté aucun élément pouvant étayer sa grave mise en cause des ONG, mais a expliqué que celles-ci «ressentent le manque d’argent», après la suspension des financements.
«On a retiré l’argent aux ONG. Elles recevaient 40% des subventions venant de l’étranger. Elles ne les ont plus. On a aussi mis fin aux subventions publiques» aux ONG, a-t-il expliqué.
«Le feu, apparemment, a pris dans des lieux stratégiques», a-t-il insisté. «Même vous ne pourriez aller filmer dans tous les lieux où cela brûle, et envoyer (vos vidéos) à l’étranger», a-t-il dit aux journalistes.
«Parce que tout indique qu’ils sont allés là-bas pour filmer des incendies. C’est ce que je ressens».
Avalanche de critiques
Les feux en Amazonie sont habituellement provoqués par les défrichements par brûlis utilisés pour transformer des aires forestières en zones de culture et d’élevage ou pour nettoyer des zones déjà déforestées, généralement pendant la saison sèche qui s’achève dans deux mois. Selon l’INPE, la déforestation en juillet y a été quasiment quatre fois supérieure au même mois de 2018.
Jair Bolsonaro est la cible d’une avalanche de critiques de scientifiques, d’ONG de préservation de l’Amazonie et des populations indigènes pour son soutien au développement de l’agriculture et de l’exploitation minière, notamment dans des zones protégées.
Les deux contributeurs principaux du Fonds Amazonie, la Norvège et l’Allemagne, ont récemment annoncé suspendre leurs subventions à ce fonds qui permet de financer la préservation de la forêt, en raison des positions du président brésilien.
M. Bolsonaro a fait ces commentaires polémiques au moment où se tient à Salvador de Bahia la semaine du climat en présence de quelque 3 000 délégués de 26 pays, une réunion régionale sur le changement climatique coordonnée par l’ONU.
«Le nuage qui a recouvert Sao Paulo est un phénomène déjà constaté en 2010 et 2017», a déclaré le ministre de l’Environnement Ricardo Salles, présent à Salvador. «Mais de toute façon nous sommes préoccupés», a-t-il admis.