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1,5 M$ pour les sites de consommation supervisée à Montréal

Photo: Archives Métro Média, Josie Desmarais

Le gouvernement ajoute près d’1,5 M$ de financement pour les services de consommation supervisée et de vérification de drogues à Montréal. Les quatre organismes communautaires Cactus Montréal, Spectre de Rue, Dopamine et L’Anonyme sont les plus gros bénéficiaires de cette somme. Ils recevront chacun environ 300 000 $.

De plus, 252 000$ seront alloués à la Direction régionale de santé publique de Montréal (DRSPM) pour le développement de nouveaux services de consommation supervisée et de vérification de drogues à Montréal. L’affectation des ressources se fera en fonction des besoins identifiés par la DRSPM.

L’annonce a été faite par le ministre Lionel Carmant lors de la visite de l’organisme à but non lucratif Spectre de rue, en compagnie de Josefina Blanco, conseillère municipale et responsable du dossier de l’itinérance au comité exécutif de la Ville de Montréal.

Ce nouveau financement s’ajoute aux 2,2 M$ déjà accordés par le gouvernement du Québec aux organismes mentionnés. Il s’agit d’une augmentation de 55 % de leur financement.

Un « réajustement »

Pour les quatre sites de consommation supervisée, l’annonce de ce financement récurrent est «une excellente nouvelle», croit la directrice générale de Spectre de Rue Annie Aubertin.

Jusqu’alors, ces organismes composaient avec une enveloppe insuffisante pour permettre un maintien optimal de leurs activités. «À Spectre de rue, on gère un budget de 2,3 M$ par année pour un financement récurrent de 200 000 $ à travers le [programme gouvernemental de soutien financier aux organismes communautaires]», précise-t-elle. Pour Cactus Montréal, la proportion est de 250 000 $ pour un budget de 4 M$, précise son directeur général Jean-François Mary.

Leurs heures d’ouverture des sites d’injection supervisée avaient dû être réduites pour permettre de préserver une quantité sécuritaire de personnel sur les lieux. «La conséquence, c’est qu’il a plus d’injecteurs dans les rues», nuance Mme Aubertin.

Les nouvelles sommes distribuées à Cactus Montréal, Spectre de Rue, Dopamine et L’Anonyme leur permettront de prolonger leurs horaires, bien qu’idéalement, ajoute-t-elle, leurs services devraient être disponibles tous les jours et heures de la semaine.

Ce 300 000 $ est d’autant plus synonyme de stabilité, renchérit Jean-François Mary. Cette somme pourra être entre autres allouée à la formation à long terme de travailleurs de rue auprès des communautés vulnérables.

«Pour former un travailleur de rue efficace, ça prend une année de formation avant qu’il fasse à peu près son travail. En abolissant des postes, faute d’argent, on perd des contacts et des accès privilégiés. On travaille bien avec nos populations qui ne sont pas du bétail», insiste-t-il.

La directrice générale de Spectre de Rue Annie Aubertin accompagnée de ses confrères chez L’Anonyme (Julien Montreuil), Dopamine (Yanick Paradis) et Cactus Montréal (Jean-François Mary). Photo: Isabelle Chénier, Métro.

Le ministère de l’Emploi et de la Solidarité sociale : «un acteur qui n’est jamais là»

Profitant de la présence du ministre Carmant et de l’élue Blanco dans les locaux de Spectre de Rue, sa directrice a pointé d’autres enjeux liés à celui de la consommation. La décriminalisation des drogues, la santé mentale et physique et plus particulièrement la question de l’itinérance nécessitent une collaboration accrue entre le milieu communautaire et les gouvernements.

«Tu ne peux pas rester dans la rue et maintenir une saine santé mentale. […] Il faut travailler fort pour que tout le monde ait sa place sur cette planète, y compris les gens qui sont en situation de dépendance.»

Un sentiment partagé par M. Carmant, encore marqué par le décès d’Alain Magloire en 2014, lors d’une arrestation policière, a-t-il fait part.

« Alain Magloire était un Québécois d’origine haïtienne comme moi. C’était un gars qui faisait de la recherche biomédicale comme moi. Ç’a aurait pu être moi. Je suis là pour aider les itinérants, pas pour les cacher ».

Si l’implication du ministère de la Santé et des Services sociaux est appréciée par ces organismes, l’absence de son homologue chargé de l’Emploi et de la Solidarité sociale dérange Jean-François Mary de Cactus Montréal.

«Il n’est jamais jamais présent. Ça fait 15 ans que je suis dans le milieu et je ne l’ai jamais vu autour d’une table, alors que la question clé pour l’itinérance, c’est le revenu des gens, tonne-t-il à Métro. Quand on a une aide sociale de même pas 700 $ par mois, ce n’est pas étonnant dans le contexte actuel de la crise du logement, de l’augmentation du coût de la vie, qu’on voit une augmentation majeure des personnes qui vivent dans la rue.»

Selon M. Mary, une part de la solution à l’itinérance à Montréal est intimement liée à l’établissement d’un revenu minimal garanti, une idée qui a déjà été testée en Colombie-Britannique.

«Il y a eu un impact positif sur les gens. Pourtant aucun équivalent du ministère de l’Emploi et de la Solidarité sociale dans les provinces canadiennes ne prend la balle au bon et n’agit de manière concrète», déplore le directeur général.

Le revenu minimal garanti serait un moyen de soutenir les personnes et les familles vivant dans une situation d’extrême pauvreté, un quart-monde qui ne devrait pas être dans une province aussi riche comme le Québec, conclut-il.

«De la poudre aux yeux»

Pour sa part, le porte-parole de l’opposition officielle à l’hôtel de ville en matière d’itinérance Benoit Langevin considère que les sommes additionnelles versées aux quatre organismes représentent «des miettes quand on constate l’ampleur et les ravages de la crise de l’itinérance et des opioïdes à Montréal».

«Le gouvernement du Québec rétablit seulement ce qui a été coupé, il ne répond pas à l’augmentation massive des besoins», affirme-t-il dans un courriel.

Cette annonce jette de la poudre aux yeux, critique M. Langevin qui estime que l’administration plante devrait formuler des demandes plus claires auprès du gouvernement.

«Combien d’argent est nécessaire pour être en mesure d’offrir des ressources 24/7, combien de travailleurs de rue et d’infirmières supplémentaires avons-nous besoin sur le terrain, à combien s’élèvent les besoins financiers des organismes de première ligne afin de bonifier leurs services ?», cite-t-il en exemple.

En collaboration avec Clément Bolano.

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