Sur la rue Jean-Talon Est, plus de 10% des espaces commerciaux situés en rez-de-chaussée sont vacants. Une proportion supérieure à ce qui est qualifié d’économiquement sain. Cette situation inquiète les commerçants de l’artère qui espèrent qu’une série de consultations lancée par la Ville de Montréal permettra d’enrayer le phénomène.
Les enseignes « À louer » pullulent sur l’artère commerciale principale de Saint-Léonard. Les fenêtres de certains locaux désertés sont même placardées de cartons. Si les effets des difficultés commerciales sont bien visibles, les causes seraient encore méconnues.
« À ce stade-ci, on connaît plus ou moins les problèmes qui concernent les grandes artères comme Sainte-Catherine ou Saint-Denis, explique Dominic Perri, conseiller de ville à Saint-Léonard. Par contre, on en sait moins sur les rues des arrondissements plus excentrés comme Saint-Léonard ou Montréal-Nord. »
Pour en savoir plus, M. Perri, qui est aussi vice-président de la commission qui mène actuellement les consultations publiques, espère une forte participation à la réunion qui se déroulera à Saint-Léonard, le 4 février prochain.
« On n’en est pas encore au stade solution. Ce serait prématuré avant d’avoir entendu l’ensemble des consultations, modère M. Perri. Une fois cela fait, on pourra établir des mesures pour aider les marchands de nos artères commerciales à mieux faire. »
Entre espoir et scepticisme
À la Société de développement commercial (SDC) de la rue Jean-Talon, qui s’étend des rues Viau à de la Villanelle, la série de consultations est accueillie d’un bon œil, si ce n’est avec un certain scepticisme.
« Les problèmes qu’on a ici, on en parlait déjà 2004. Nous sommes en 2020, et ils ne sont pas encore réglés, se désole Paul Micheletti, président de la SDC. On a eu une multitude d’études et de consultations qui n’ont mené à rien. »
Néanmoins, M. Micheletti espère que la consultation pourra servir de point de départ pour des mesures concrètes.
« C’est quelque chose de bien qui pourrait aider la situation, croit Robert Spiridigliozzi, propriétaire du Café Buongiorno. En ce moment, c’est difficile. Les locaux sont vides pour une raison. C’est le résultat d’un ensemble de facteurs. »
Des rues en manque d’achalandage
En plus des locaux vides, les rues sont trop souvent désertes, selon les commerçants.
« Il y a plein de logem
ents sur la rue Jean-Talon ou à quelques minutes de marche, mais les résidents n’y viennent pas. Ils vont utiliser Jean-Talon pour se déplacer ailleurs, constate M. Micheletti. Pour que ça reste local, il faut pouvoir vivre le quartier, qu’on puisse le marcher. »
Il compare à cet effet la situation des rues Masson et Fleury qui, selon lui, fonctionne très bien en raison des différentes mesures mises en place pour les rendre plus attrayantes.
En 2017, la Ville de Montréal avait lancé un projet de réaménagement de la rue Jean-Talon Est, évalué à 15 M$. Celui-ci a été mis sur la glace l’année suivante en raison de l’annonce du prolongement de la ligne bleue du métro.
Dans l’attente des travaux, l’arrondissement a aménagé un corso, dans l’optique d’y augmenter l’achalandage. Une mesure qui n’a pas encore eu l’effet escompté en raison de retards dans sa construction.
« Pour qu’un commerce fonctionne, ça prend des gens qui viennent sur la rue. Mais il n’y a pas de va-et-vient sur Jean-Talon. Sans compter que les locaux sont extrêmement chers », déplore Michel Cadieux, qui fermera son magasin de surplus d’armées à la fin du mois de janvier.
« La rue Jean-Talon est morte !, lance Robed Estéril, copropriétaire d’ Epiceskay. Il faut que les gens ici en fassent davantage pour animer le quartier afin de mettre de l’ambiance et donner une raison aux gens de sortir sur la rue. » Il explique que lui-même s’en sort en organisant divers événements dans son restaurant qui rejoignent sa clientèle.
Alléger le fardeau
Outre le manque d’achalandage sur les rues, les commerçants rencontrés dénoncent également des frais d’exploitation élevés, que ce soit le coût des loyers ou les taxes imposées. Une solution pourrait être d’alléger le fardeau fiscal des petits commerçants.
« Ça pourrait encourager du monde à se lancer dans le commerce, s’ils n’ont pas à constamment s’inquiéter à propos des dépenses », pense M. Spiridigliozzi
De son côté, M. Micheletti rappelle que les commerçants ne sont pas tous propriétaires de leur local. « C’est trop facile de laisser des locaux vacants, souligne-t-il. Je vois parfois des locaux qui sont vides depuis un an ou deux. Il faut que les propriétaires des bâtisses soient plus responsables. »
M. Micheletti remarque à cet égard que certains bâtiments sont défraichis. « Il faut donner à Jean-Talon l’importance qu’elle mérite et mettre les efforts pour qu’elle fonctionne », revendique-t-il.
La consultation publique de Saint-Léonard aura lieu le 4 février, à 19h, à la bibliothèque d’arrondissement.