Des délais dans le traitement des dossiers de travailleurs étrangers spécialisés donnent des maux de tête à des entreprises de l’est de Montréal. Le député fédéral de La Pointe-de-l’Île, Mario Beaulieu, a interpellé le ministère de l’Immigration à cet effet lors d’une visioconférence de presse.
Travailleur sans frontière (TSF) recrute des travailleurs étrangers en Amérique centrale pour combler des besoins de main-d’œuvre spécialisée dans divers domaines au Québec.
Or, la pandémie aurait retardé le traitement des dossiers à l’ambassade du Canada au Mexique, notamment en raison des retards pour l’obtention d’examens médicaux et des relevés de données biométriques nécessaires à l’obtention de visas, explique M. Beaulieu.
Conséquemment, 32 entreprises faisant affaire avec TSF sont, après des mois, toujours en attente de 149 travailleurs, sans savoir où en est leur dossier, soutient Luc Plamondon, président de TSF.
Une situation qui pourrait mettre en péril les activités de l’entrepreneur basé à Pointe-aux-Trembles. «Tout le monde est dans l’incertitude. Il y a des gens qui ont investi 25 000$ et ont déjà commencé leur saison. L’an passé ils n’ont pas été dédommagés non plus. C’est aberrant.»
Par voie écrite à la mi-février, M. Beaulieu indique avoir demandé à Peter Schiefke, secrétaire parlementaire du ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté d’avoir plus de transparence dans ce dossier. Une communication laissée sans réponse hormis un accusé de réception.
«On voudrait que le ministère communique clairement leurs intentions. Qu’ils nous fournissent un calendrier avec des objectifs de priorisation, qu’ils nous expliquent qu’est-ce qui se passe à l’ambassade canadienne au Mexique.»
Pénurie de main-d’œuvre
Les clients de TSF vivent aussi difficilement ce retard. Sophie Boisvert, directrice des ressources humaines pour Boiseries Raymond, une entreprise basée à Rivière-des-Prairies, indique avoir investi des «milliers» de dollars pour la main-d’œuvre et toujours attendre quatre travailleurs après plus d’un an.
Une situation qui tombe mal alors que les problèmes de recrutement et la rétention sont amplifiés par la pandémie, notamment en raison de la Prestation canadienne d’urgence (PCU) et la Prestation canadienne de la relance économique (PCRE), soutient-elle.
Sursollicités, les employés en fonction sont aussi fatigués et plus propices à faire des accidents de travail, qui ont augmenté dans le dernier mois, indique-t-elle.
À cela s’ajoute une pénurie de matériaux de construction. «Comme on n’arrive pas à avoir la main-d’œuvre nécessaire à faire notre production, on a des retards. Nos clients sont insatisfaits.»
Également en attente de quatre travailleurs étrangers, Marc Charlebois, directeur général de Portes unies St-Michel, évoque que la pandémie a fait augmenter la demande pour son entreprise. Pourtant, la croissance est freinée dans ces conditions.
«Le marché est là. Mais je ne suis pas capable de fournir.»
Incertitude
Les entrepreneurs, qui s’engagent à trouver un logement pour les travailleurs étrangers, sont pris au dépourvu. «On ne peut pas préparer un logement, payer et espérer qu’ils arrivent», soutient Mme Boisvert.
M. Charlebois est allé lui-même au Nicaragua recruter des travailleurs, lesquels ont reçu la promesse «d’une vie meilleure» au Canada. Il s’attriste de ne pas pouvoir concrétiser la chose.
«Ils ne savent pas quand ils vont changer de vie», déplore-t-il.
Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada n’avait pas répondu à nos questions au moment de publier.