Quelques membres du personnel de l’Hôpital général du Lakeshore auraient signalé par courriel au ministère de la Santé le décès de trois personnes dans les douze derniers mois des suites d’une négligence systémique, a appris The Gazette. Le gouvernement n’aurait pas tenté d’en apprendre plus sur les circonstances du décès des patients aux urgences après avoir accusé réception de ces signalements.
Au total, six décès seraient survenus aux urgences en raison d’erreurs médicales et d’un manque de supervision depuis 2019. Aucune réunion n’aurait été tenue pour que le personnel apprenne des erreurs commises et pour empêcher de nouveaux cas de négligence. De plus, les familles n’auraient pas été averties immédiatement des circonstances du décès de leurs proches, ce qui contrevient au Code de déontologie des médecins mis à jour en 2022 par rapport aux accidents et erreurs médicales.
Un des décès répertoriés concernerait un homme de 81 ans qui a subi un arrêt cardiaque alors qu’il n’aurait pas été en surveillance accrue malgré les risques élevés de complications cardiaques inscrits à son dossier médical. Il se serait plaint à plusieurs reprises de douleurs, et n’aurait reçu qu’une Tylenol, avant d’être placé sur une civière sans davantage de surveillance. Les responsables des urgences du Lakeshore expliquent que les infirmières qui assurent les quarts de travail de nuit sont régulièrement en effectifs réduits, ce qui diminue la qualité des soins et augmente les risques d’erreurs médicales.
Un état déplorable
Les urgences de l’hôpital situé à Pointe-Claire, dans l’Ouest-de-l’Île, ont fait les manchettes à plusieurs reprises dans les derniers mois par rapport à la difficulté qu’elles éprouvent à offrir des soins de qualité. Un rapport publié en octobre dernier avait qualifié la situation de véritable «bombe à retardement» en raison du manque de supervision, des formations insuffisantes pour le personnel en plus du manque de remplacements pour les infirmières, ce qui les oblige à travailler à effectifs réduits.
«Ce n’est pas pour rien que l’employeur avait demandé au ministère de la Santé de fermer les urgences à quelques reprises pendant les Fêtes en 2022, précise la présidente du Syndicat des professionnelles en soins de santé de l’Ouest-de-l’Île-de-Montréal (FIQ-SPSSSODIM), Johanne Riendeau. Il n’y avait pas assez d’infirmières pour assurer des soins de qualité, mais le gouvernement a refusé catégoriquement de fermer les urgences. Ça va faire 39 ans que je suis infirmière, et je n’ai jamais vu le personnel dans un état aussi lamentable.»
Plus d’infirmières sont nécessaires
La présidente du syndicat ajoute que les urgences sont constamment en sous-effectif, et que ce problème est structurel et connu du ministère de la Santé depuis plusieurs mois. Le rapport de Marie Boucher publié en octobre dernier recommandait l’embauche de 30 infirmières supplémentaires d’ici avril 2023, chose qui est loin d’être réalisée.
«On doit fermer les urgences parce qu’on ne peut pas assurer des soins de qualité. Avec cinq infirmières en dessous du seuil minimal, il est clair que des erreurs médicales seront commises, et c’est pour cela que le rapport insistait sur l’embauche de personnel supplémentaire. On est rendus à quatre mois depuis la publication du rapport, et cinq infirmières ont été embauchées sur les 30 recommandées. On est bien loin du compte.»
À ce chapitre, plus d’une centaine de membres affiliés à quatre syndicats du CIUSSS de l’Ouest-de-l’Île-de-Montréal ont manifesté devant l’Hôpital Lakeshore le 15 février dernier. Ils ont dénoncé le manque de communication de la part de leurs employeurs en plus des mauvaises conditions de travail liées au manque de personnel, ce qui entraîne une dégradation de la qualité des soins offerts.