Gayance, un retour aux sources
Gayance, c’est une DJ nord-montréalaise qui fait carrière en Europe après avoir laissé sa marque à Montréal. De retour dans sa ville natale en raison de la pandémie, elle a raconté son parcours à Métro.
Lorsqu’on lui parle de Montréal-Nord, quartier où elle a passé les 18 premières années de sa vie, Aïsha Vertus, alias Gayance, se rappelle du programme d’art de l’école primaire Sainte-Gertrude et des heures passées dans les autobus pour se déplacer vers son école secondaire, des éléments qui ont contribué à son éveil musical.
«J’avais mon CD player antichoc dans la 505 et la 199. Je me faisais des mixtapes et j’allais à l’école. Ma connaissance musicale s’est faite comme ça.»
Gayance est née d’une famille qui a laissé sa marque dans Montréal-Nord. Son père, Lazard Vertus, a travaillé à la Maison des jeunes l’Ouverture et a fondé le tournoi de basket de rue, un événement communautaire par lequel sont passées des vedettes montantes de la NBA.
«C’est un quartier que les gens adorent salir. Mais pour moi, c’est un des plus beaux quartiers de Montréal.»
Expatriée
C’est toutefois en Europe que Gayance a décidé de faire carrière lors des cinq dernières années. Basée à Bruxelles, elle affirme avoir trouvé davantage de possibilités dans la région.
«Il y a beaucoup de mouvement, en termes de spectacles et de gens. En termes de proximité des autres grandes villes, c’est parfait.»
Aïsha Vertus passe toutefois ses étés au Brésil, pays dont elle adore la culture et où elle puise régulièrement des trouvailles musicales dont elle s’inspire dans son art.
«Je trippe sur le rock psychédélique brésilien», dit celle qui parle couramment portugais.
Une force tranquille
Si le grand public ne connaît peut-être pas Gayance, la DJ est depuis plusieurs années respectée dans le milieu du beatmaking montréalais.
Elle a contribué à la production de gros morceaux, notamment pour Dead Obies et Kaytranada, en partageant des disques qui y ont été échantillonnés.
«Je suis l’espèce de fille qui est derrière tout le monde, mais personne ne le sait. Tout le monde piquait dans ma collection pour sampler parce qu’ils savaient que j’avais des disques assez weird.»
Aujourd’hui, à Bruxelles, elle côtoie aussi les grands noms de la scène locale, comme le Motel et Roméo Elvis.
Critique de l’industrie
Aïsha Vertus a été élevée par deux parents activistes, qui l’ont rapidement initiée à des causes sociales.
«Ma mère m’obligeait à lire du Malcolm X et Che Guevara et à faire des résumés d’une page», se souvient-elle.
Si la principale intéressée ne se considère pas comme une activiste, elle n’a certainement pas la langue dans sa poche en tant qu’artiste.
«J’ai des opinions qui peuvent vraiment déranger.»
Elle n’hésite pas pour critiquer ses pairs de l’industrie musicale. Au début de l’été, alors que le mouvement «Black Lives Matter» était relancé, elle avait dénoncé le silence dans le milieu du hip-hop québécois, où plusieurs têtes d’affiche sont blanches.
«Je ne suis pas en train de dire que ces gens-là sont racistes. Mais le silence, surtout quand tu es dans une position de privilège, ça fait mal.»