Le rapport accablant sur le racisme systémique de l’Office de consultation publique est accueilli favorablement à Montréal-Nord et met le doigt sur des enjeux vécus depuis longtemps par sa population.
«Le rapport est direct, il nomme les choses, réagit la coordonnatrice générale de l’organisme Parole d’excluEs, Bochra Manaï. Lorsque c’est l’Office de consultation publique qui le fait, ça a une légitimité qui est très importante. Ça valide ce que plein de groupes disaient, et qu’on faisait taire», ajoute celle qui avait présenté un mémoire à la commission après avoir consulté les citoyens de Montréal-Nord.
Dévoilé ce matin après deux ans de travaux, le rapport produit par Commission sur le racisme et la discrimination systémique dans les compétences de la Ville de Montréal affirme que cette dernière a «négligé» la lutte contre le racisme et la discrimination.
«Montréal-Nord est une communauté qui est très touchée par les enjeux de discrimination et racisme systémique. Ce qu’on constate ces dernières années, c’est que nos jeunes nous parlent beaucoup d’enjeux liés au profilage racial, de discrimination liée au logement, d’accessibilité liée au transport et à l’emploi.» -Renée-Chantal Belinga, conseillère d’arrondissement à Montréal-Nord
Satisfaite du rapport, Mme Belinga s’attend à plus que ce qu’a annoncé l’administration Plante. «Il faut que le SPVM reconnaisse le profilage racial et social et s’engage à lutter contre celui-ci», martèle-t-elle.
Selon Mme Manaï, les élus doivent notamment travailler sur leurs propres biais systémiques. «Les élus ne s’informent pas assez sur ces questions-là. Ils ne sont pas assez formés.»
Actions
Après la mairesse de Montréal, la mairesse de Montréal-Nord, Christine Black, a à son tour reconnu l’existence du racisme systémique au sein de son arrondissement.
«Il y a une personne sur quatre à Montréal-Nord qui est noire. Par la force des choses, c’est sûr que ça vient beaucoup toucher les citoyens du quartier.»
Elle estime qu’elle devra analyser davantage le rapport avant de se prononcer sur les actions qu’elle compte poser pour répondre aux recommandations.
«J’ai demandé à la direction de l’arrondissement de vérifier ce qu’on pouvait faire. Le rapport s’adresse à la Ville, mais il y a des éléments qu’on peut analyser pour faire en sorte d’amener davantage de changements au niveau du quartier.»
Elle anticipe toutefois que Montréal-Nord aura du pain sur la planche.
«On va avoir beaucoup de travail à faire. Ça va prendre des ressources humaines et des ressources financières. On s’attend à un soutien de la ville centre pour aller plus loin.»
Représentativité
La mairesse Christine Black souligne toutefois que Montréal-Nord fait «bonne figure» quant à la représentativité des personnes issues des minorités visibles au sein de ses employés.
Celui-ci se calcule avec par ratio, soit le taux de minorités visibles au sein du personnel en rapport avec celui dans la population. L’arrondissement de Montréal-Nord enregistre un ratio de .55, alors qu’il est de .44 pour l’ensemble de Montréal. Une représentativité parfaite équivaudrait à un ratio de 1.
«Il faut continuer. On fait plusieurs embauches régulièrement, et à bien des moments, on a des personnes issues de la diversité. Pour moi, c’est une très bonne nouvelle.»
L’instigateur insatisfait
À l’origine de la pétition de 22 000 signatures qui a permis de lancer la consultation, l’ancien candidat de Projet Montréal dans Montréal-Nord Balarama Holness a qualifié de «pas sérieux» les déclarations de la mairesse Valérie Plante en lien avec le rapport.
«Ça va prendre une nouvelle administration, ou alors des gens sérieux à l’hôtel de ville, lance-t-il en entrevue avec Métro. Il faut que les gens puissent rapporter leurs craintes, et que les sanctions soient équivalentes à l’ampleur de la discrimination.»
Selon lui, la Ville doit rapidement s’engager à mettre sur pied un «plan d’action clair» de lutte contre le racisme systémique. «Il faut qu’on ait un rapport chaque année pour donner un aperçu de la situation des personnes racisées, et de leur intégration. On n’a rien vu de concret à ce niveau», ajoute-t-il.
En collaboration avec Henri Ouellette-Vézina