Pour Évelyne David, l’idée selon laquelle les personnes vivant avec une déficience intellectuelle « souffrent » de leur condition doit cesser d’être mise de l’avant. «Ils ne souffrent pas, au contraire, nos participants sont enjoués et heureux la plupart du temps, explique l’intervenante. C’est simplement un état mental différent, mais qui ne leur permet pas d’être autonomes.»
En cette 34e édition de la Semaine québécoise de la déficience intellectuelle, qui a lieu du 20 au 26 mars, Métro a visité les locaux de la Corporation L’espoir, organisme laSallois qui accueille et accompagne des personnes qui présentent une telle condition.
Dans le bâtiment résidentiel du quartier Côte-Saint-Paul, dans le Sud-Ouest, qui abrite le répit de jour de l’organisme, les quatre participants s’affairent tranquillement à leur dernière activité en ce mercredi après-midi.
Ce service permet à ces adultes de socialiser à l’extérieur de leur domicile, en plus d’offrir un répit pour leurs aidants naturels. Parmi ses services, la Corporation L’espoir, qui a commencé comme camp d’été, offre aussi un répit de soir et de fin de semaine ainsi qu’un programme d’apprentissage à la vie autonome.
Marie-Claude, 50 ans, s’applique à placer les morceaux de son casse-tête de 100 pièces d’Obélix qu’elle affectionne particulièrement. «Marie-Claude, elle a une condition sévère qui ne lui permet pas d’interagir facilement avec les autres, mais elle adore les casse-têtes. C’est ce qu’elle fait la majeure partie de la journée par semaine qu’elle passe au répit», fait savoir Évelyne David.
Dans une autre pièce, Catherine, qui présente un trouble du spectre de l’autisme sévère, passe la dernière demi-heure de sa journée, qui est organisée selon un horaire strict qu’elle suit religieusement, à surfer sur sa tablette électronique.
Dans la cuisine, Charlotte, atteinte du syndrome de Joubert, et Peggy terminent tout juste leurs activités quotidiennes qui ont comporté du chant, de la danse, des parties de Uno et du bricolage.
Lucia Bela, qui les encadre durant les trois jours qu’elles passent au centre, expose leurs œuvres du moment, qui va de listes d’épicerie à des colliers de billes colorés, devant le regard heureux des créatrices. «Je suis très fière de ce qu’elles font, elles sont extrêmement persévérantes», confie l’intervenante.
Développer l’estime de soi
«Nous ne sommes pas là pour “faire apprendre”, mais en leur proposant différentes activités comme des bricolages ou d’autres formes d’art, ça leur permet de maintenir une certaine autonomie et de développer leur estime de soi», révèle Évelyne David. Ces loisirs aident aussi à garder le plus longtemps possible leur motricité et à continuer de la développer.
Il y a trois clés dans notre travail: l’observation, l’adaptation et la patience.
Évelyne David, intervenante de la Corporation L’espoir
«Il faut y aller à leur rythme et c’est à ce moment-là qu’on peut créer une vraie connexion avec eux», ajoute l’intervenante animée par la volonté de rendre toute la dignité aux personnes qu’elle accompagne et qui sont souvent incomprises.
Si elle les appelle affectueusement ses «jeunes», c’est le fait qu’ils soient adultes qui motive Évelyne David à se lever chaque matin.
«Dans les médias et dans la société en général, on parle souvent d’enfants atteints de déficience intellectuelle et on a l’impression qu’une fois adulte, leur condition disparaît… mais ce n’est pas vrai!», soutient celle qui travaillait d’abord avec les enfants atteints de trisomie 21. «Ces adultes aussi ont besoin que l’on prenne soin d’eux.»