Pandémie a aussi rimé avec surchauffe immobilière. Mais y a-t-il un espoir que ça (re)devienne «achetable» pour les futurs propriétaires? Enfin des réponses.
On est actuellement témoin «d’un déficit d’offre phénoménal que l’on n’avait jamais enregistré au cours des 30 dernières années», indique Charles Brant, le directeur du service de l’analyse du marché à l’Association professionnelle des courtiers immobiliers du Québec (APCIQ), pour expliquer cette hausse soudaine.
Ce déficit n’est pas près de se résorber. Selon les statistiques combinées de DuProprio.com et de l’APCIQ, en date d’août 2021, l’offre de propriété à vendre a encore reculé de 6% par rapport à août 2020.
«Il manque tellement de maisons sur le marché que l’on devra attendre longtemps avant de retrouver un équilibre», estime pour sa part Darren King, économiste à la Banque Nationale.
Si le manque criant de maisons existait bien avant la pandémie, le phénomène a continué de s’accentuer pendant celle-ci. On traînerait même ce déficit depuis au moins 15 ans, selon Charles Brant.
«Il faudrait l’équivalent d’une année de construction d’unités de logement instantanément disponibles sur le marché pour compenser ce déficit et revenir à un équilibre», affirme-t-il.
Ce déficit de l’offre se traduit en surenchères multiples, effet accélérateur de la hausse des prix, considérées comme très dangereuses pour l’économie.
Combinés à cette rareté, les taux d’intérêt historiquement bas contribuent à accentuer ce phénomène qu’on qualifie désormais de «bulle immobilière». Évidemment, ils stimulent la demande puisqu’ils permettent une capacité d’emprunt accrue. Ce n’est donc pas pour rien que les transactions se sont scellées si rapidement le printemps dernier.
Signe d’un ralentissement?
Charles Brant croit que l’on atteint cependant un plafond d’«abordabilité» qui fait en sorte que le bassin d’acheteurs potentiels se réduit.
«L’abordabilité est en train de se détériorer, ce qui explique que l’on voit une accélération moins forte que ce qu’on a connu au cours des derniers mois.»
Selon les données du site DuProprio.com, pour les condos et les multiplex, la progression continue, mais de façon plus modérée, comparativement aux quatre premiers mois de l’année, soit entre janvier et avril 2021.
«On commence à voir un ralentissement de la croissance», confirme Darren King de la Banque Nationale, parlant uniquement des copropriétés.
Selon les statistiques de la Banque Nationale, au mois de juin, la croissance de prix sur un an des copropriétés était de 17,8%. Elle a ensuite diminué à 15,6% au mois de juillet.
Mais il y a un mais
Ce ralentissement n’a cependant rien de marquant, nuance M. King.
«Ce n’est pas une tendance encore, ce n’est que le premier signe d’un ralentissement. Ce sera à suivre dans les prochains mois.»
La croissance continue de s’accélérer pour ce qui est des maisons unifamiliales, par exemple.
La chargée des communications et relations média chez DuProprio ajoute des précisions: «Selon notre analyse des quatre derniers mois, la tendance des prix continue d’être à la hausse pour les propriétés vendues sur l’île de Montréal, pouvant varier entre 2% à 26% d’augmentation selon le type d’habitation convoité. L’engouement et la rareté de l’unifamiliale font en sorte que se maintient une forte progression des prix.»
À quand l’accalmie?
Il faudra être patient avant que les prix se stabilisent. «Cela va prendre du temps avant que ça ralentisse de façon importante. Et on ne parle toujours pas de diminution de prix… Au fur et à mesure que les taux d’intérêt vont se remettre à augmenter, l’économie va reprendre. C’est là qu’on s’attend à ce que la croissance des prix ralentisse. Elle pourrait peut-être diminuer légèrement en 2023, mais rien avant, c’est sûr et certain», croit l’économiste de la Banque Nationale.
Charles Brant conseille par ailleurs à ceux qui désirent acheter une propriété d’attendre encore une année ou deux, histoire que l’euphorie du marché s’estompe et que les conditions s’améliorent à la faveur des acheteurs.