LETTRE OUVERTE – La controverse se poursuit dans l’affaire de cette photo d’une petite fille portant le hijab, publiée en page couverture du Canadian Medical Association Journal (CMAJ).
La lettre, pleine de sens, d’un éminent chirurgien pédiatrique, le Dr Sherif Emil, intitulée «N’utilisez pas un instrument d’oppression comme un symbole de diversité et d’inclusion» que le CMAJ a publiée, a suscité des plaintes. Le CMAJ s’est d’abord excusé d’avoir publié cette lettre, puis a annoncé qu’il revoyait tout son processus de publication de lettres. Il a enfin décidé de retirer complètement la lettre du Dr Emil de sa publication (nous ne pouvons donc pas partager de lien à cette lettre)!
Revenons aux circonstances et à l’essentiel de cette controverse.
La pratique du voilement de fillettes et ce qu’elle implique de discrimination, de ségrégation et d’effets négatifs sur l’image de soi des fillettes qui y sont soumises, est nocive et inacceptable. Les questionnements au sujet de cette pratique sont parfaitement légitimes. Notons tout de suite qu’on ne parle pas ici de femmes adultes qui font le choix de porter le hijab, mais bien d’enfants à qui on l’impose. Quand la rédactrice en chef intérimaire du CMAJ, Mme Kirsten Patrick, s’excuse d’avoir publié la lettre du Dr Emil et affirme que le «CMAJ va toujours respecter et supporter le droit des femmes de choisir de s’habiller comme elles le souhaitent », elle choisit de faire dévier le débat et fait preuve de malhonnêteté intellectuelle. La question n’est pas celle du libre choix des femmes, mais celle du voilement des fillettes.
De plus, faire la promotion de la pratique du voilement de fillettes et la présenter comme banale ou normale par la diffusion de cette image sur la page couverture d’une revue médicale, comme l’a fait le Canadian Medical Association Journal (CMAJ), est inacceptable.
Le Dr Sherif Emil a eu le courage de dénoncer cette image et cette pratique qui est, soit dit en passant, tout à fait marginale chez les musulmans. Il l’a fait avec respect et nuance.
Le Conseil national des musulmans canadiens (CNMC) et l’Association médicale musulmane du Canada ont immédiatement accusé le Dr Emil d’islamophobie et ont décidé de lui faire payer le prix de sa dénonciation, à coup de plaintes, de demandes d’enquêtes sur sa pratique médicale et de dénonciations faites à son institution d’enseignement et dans les médias.
Par conséquent, le Dr Emil a été la cible, en quelques jours, de nombreuses plaintes, de tentatives d’intimidation et de menaces. Même si plusieurs l’ont appuyé privément, personne ne s’est levé publiquement pour le défendre. Finalement, il s’est excusé et s’est rétracté publiquement dans une longue lettre, toute en nuances, en expliquant les raisons de sa démarche initiale.
Le CMAJ a finalement décidé, lâchement, de céder aux pressions du Conseil National des musulmans canadiens et de retirer l’article du Dr Emil de sa plateforme. Alors que cet article soulevait des problématiques très réelles liées au voilement des fillettes qui doivent faire l’objet d’un débat, on ne pourra plus y référer. Ce retrait d’article est totalement inacceptable dans une société libre et démocratique. De plus, l’attitude du CMAJ a causé un préjudice irréparable au Dr Emil qui avait soulevé, en toute bonne foi, des questions légitimes au sujet de cette pratique.
Le Canadian Medical Association Journal aura beau faire taire le Dr Emil et retirer son article, il n’en demeure pas moins que le voilement de fillettes est une pratique inacceptable qui laisse des séquelles sur la vie de ces enfants. À cet égard, citons juste deux réactions de femmes qui ont subi, enfants, ce voilement imposé. Il s’agit de Yasmine Mohammed et Masih Alinejad. En adoptant cette attitude de censure, le CMAJ renie, blesse et humilie ces femmes, et des milliers d’autres comme elles, qui combattent cette pratique.
Finalement, cette controverse soulève des questions importantes : doit-on, au nom de « la diversité et l’inclusion », promouvoir des pratiques, comme le voilement de fillettes, qui sont le fait d’une toute petite minorité et qui sont surtout sexistes et dommageables pour le développement harmonieux de l’enfant ? Aussi, quand un éminent pédiatre pose des questions au sujet de la banalisation et de la promotion de cette pratique, doit-on le censurer, le faire taire, le bannir et retirer son article légitime d’une revue scientifique sérieuse, sous prétexte qu’il pourrait favoriser « l’islamophobie » ? Ne devrait-on pas aborder ouvertement ces questions?
Qu’en est-il de la liberté de s’exprimer et de réellement débattre dans nos sociétés démocratiques?
Claude Kamal Codsi, président
Rassemblement pour la laïcité (RPL)