Débats

La faible qualité du français au Québec: brisons le tabou

Tribune libre
Karl Blackburn - Collaboration spéciale

En cette Journée internationale de l’alphabétisation, notre regard doit se porter sur un socle fondamental de notre société : notre langue française. Et plus encore, sur la qualité de celle-ci.

Le tabou est persistant au Québec. Difficile de se l’avouer, mais près d’un adulte québécois sur 2 est analphabète ou analphabète fonctionnel. C’est près de 2,5 millions de nos concitoyens âgés entre 16 et 65 ans qui ont de la difficulté à comprendre ce qu’ils lisent. Les réseaux sociaux nous rappellent tous les jours à quel point le français peut être écorché.

La Fondation pour l’alphabétisation milite activement pour améliorer la situation avec plusieurs outils à la portée du public et des travailleurs.

La semaine dernière, la ministre de l’Enseignement supérieur Danielle McCann a réagi : la maîtrise du français dans nos établissements supérieurs n’est pas à la hauteur. Un comité se penchera sur la question et fera de la hausse de la diplomation une priorité. Mais comment se fait-il que nos universitaires aient autant de difficultés avec la langue?

Déjà sur les bancs d’école, un trop grand nombre de nos jeunes commence à traîner ce boulet. Cette lacune, en plus de pousser certains au décrochage scolaire, peut également devenir une barrière à l’emploi. Selon une étude menée par l’OQLF en 2020, 35,5 % des entreprises québécoises, dans toutes les régions, rejettent des candidatures pour un manque de compétences en français. Cette situation est aberrante, surtout en contexte de pénurie de main-d’œuvre.

Plus qu’une source d’inquiétude, un faible taux de littératie affecte directement notre croissance économique. Les pertes se chiffrent en milliards de dollars. La Fondation avait d’ailleurs publié une étude ce printemps qui démontrait qu’un simple rattrapage en littératie pour rejoindre l’Ontario pouvait représenter une hausse de près de 5 milliards $ de notre PIB.

Le français en entreprise, une voie à suivre

La formation en entreprise doit faire partie de la stratégie quand vient le temps de penser au rehaussement de la qualité du français. La responsabilité ne doit pas seulement reposer sur le réseau d’éducation : les employeurs ont leur rôle à jouer pour protéger et améliorer la qualité de notre langue. Ils ont tout à gagner de voir des salariés de plus en plus qualifiés. Ces derniers, quant à eux, en plus d’améliorer leur productivité, auront davantage de possibilités d’avancement et de développement professionnel. C’est toute la société qui en bénéficie.

Près de 500 millions de personnes parlent français à travers le monde. Cette francophonie économique représente un marché potentiel colossal, à la portée de nos plus belles ambitions. Dans ce contexte, la qualité du français deviendra un tremplin pour le Québec, et certainement pas un boulet. À condition d’en faire une mission collective.

Par Karl Blackburn, président et chef de la direction du CPQ

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