À l’image de sa musique, du doux folk aux influences de musique du monde, Piers Faccini parle tout bas, dans un français (sa troisième langue) parfaitement maîtrisé. Entièrement libre, l’artiste pluridisciplinaire – il est aussi peintre et photographe – a partagé à Métro son approche libre de la musique et son plaisir de la jouer, ce qu’il fera dans le cadre du festival Montréal en lumière.
On n’a découvert votre musique qu’en 2014. Pourtant, vous roulez votre bosse depuis longtemps. Comment percevez-vous le fait que votre succès semble se construire petit à petit?
Je fais une musique d’auteur, c’est toujours un peu en dessous des choses hype. À partir du moment où j’ai commencé à faire mes albums, il y a 12 ans, j’ai toujours fonctionné avec le bouche à oreille. C’est ce que je préfère. Être songwritter, c’est avoir une passion pour la chanson et les textes. Cette passion fait que j’ai envie de continuer, de brûler doucement dans la longueur.
Vous donnez régulièrement des spectacles à Montréal. Qu’est-ce qui vous fait revenir si souvent?
Je ne veux pas me lancer sur un aspect de la culture que je ne connais pas, mais de l’extérieur, je trouve intéressant que Montréal soit une ville bilingue. Je fais une musique qui est faite pour les gens qui ont les horizons larges. J’ai grandi trilingue. Quand j’étais petit, je parlais italien et anglais, et maintenant je parle français parce que j’habite en France. Je constate que les gens qui parlent au moins deux langues ont une richesse. Il y a une subtilité aussi dans ce qu’on fait dans notre spectacle avec Simone Prattico, avec qui je tourne, ainsi que dans mes chansons, qui correspond bien à cette ouverture. Est-ce que c’est ça qui fait que les gens m’apprécient bien ici et que je peux revenir? Ou peut-être aiment-ils juste mes chansons? Ça, je ne sais pas.
Vous passerez 11 jours au Québec et jouerez dans des petites salles de région. C’est rare pour un artiste international. Pourquoi?
L’occasion est là. Quand je viens, c’est comme un long voyage. Je préfère être là trois semaines et faire beaucoup de dates.
Vos influences musicales sont très diversifiées. Considérez-vous créer des ponts entre différents genres musicaux qu’on n’associe pas habituellement?
C’est exactement le bon mot: le pont. J’adore cette idée. Ce qui m’intéresse, c’est d’être au centre du pont entre deux choses. Ni d’un côté, ni de l’autre; d’être vraiment au milieu. C’est un peu mes origines métissées, je crois. C’est naturel pour moi.
Votre dernier album, Songs of Time Lost, avec le violoncelliste Vincent Segal, est riche musicalement, malgré la présence de seulement deux instruments et votre voix. Qu’est-ce qui vous plaît dans cette simplicité?
C’est ce qu’on veut, ce goût pour le pur. Si ça marche comme ça, pourquoi ajouter des couches? C’est comme un calligraphe japonais. Il fait un geste. Du moment qu’il fait un deuxième geste, même s’il est absolument maîtrisé, c’est un peu dommage. Après, j’adore faire des albums différents à chaque fois, j’aime aussi ceux arrangés avec beaucoup de couches, mais il faut vouloir ça dès le début. C’est un autre exercice.
«J’adore les albums. Pour moi, un album est une œuvre en entier. C’est contre le courant des gens qui écoutent un morceau sur YouTube, puis passent à un autre artiste.» – Piers Faccini
Vous semblez faire votre travail sans contrainte, en toute liberté et avec beaucoup de plaisir. Est-ce le cas?
Je pense qu’avoir du plaisir est le truc le plus important quand on est musicien. Le plaisir de la tournée, premièrement, c’est de jouer. La partie voyage est fatigante, mais tout le reste est pour moi un moment de grâce. J’ai énormément de plaisir après les concerts à rencontrer les gens qui veulent parler. Comme ça, je peux mettre des visages et des histoires sur une ville. C’est plus personnel.
Vous partagez beaucoup vos coups de cœur musicaux avec vos fans, notamment en créant des listes d’écoute sur Spotify. Qu’est-ce que ça vous apporte?
C’est intéressant d’avoir un échange avec les gens autour. Qu’est-ce que tu aimes? Quelles sont les histoires associées aux chansons que tu aimes? Je suis un grand curieux. Et après un moment, un artiste qui parle toujours de lui-même, c’est soûlant! Donc, là, je parle, mais d’autre chose, de ce que j’écoute en ce moment, etc. C’est quelque chose qui se fait naturellement quand on est passionné.
Piers Faccini
Au Petit Théâtre Outremont
Mardi soir et vendredi à 20h