L’été dernier, Rosalie Vaillancourt avait profité de sa Soirée Carte Blanche à Juste pour rire pour annoncer qu’elle était enceinte. Un an plus tard, la populaire humoriste tenait à nouveau la barre d’un des galas (qui ont repris leur nom d’origine) au même festival, sa fille est née en en décembre 2021 et, bien sûr, son statut de nouvelle maman a teinté la vignette d’ouverture qui amorçait une série de numéros absolument hilarants, samedi soir.
«C’est mon premier spectacle depuis que je suis maman!», a hurlé la jeune femme en entrant sur la scène du Théâtre Maisonneuve, avant de décréter fièrement qu’elle est «rendue une M.I.L.F» (vous pouvez googler si vous souhaitez connaître la signification…).
La petite Marguerite («Elle n’est pas là ce soir, je l’ai laissée dans le char», a précisé sa mère) pesait 27 livres à la naissance, un chiffre qui a suscité commentaires et scepticisme, un peu trop au goût de celle qui lui a donné la vie. «Littéralement personne n’a posé de question sur mon vagin de 60 centimètres! (…) Est-ce que les gens pensent que j’ai plus de rangement qu’une Dodge Ram?», s’est-elle outrée.
Maman Rosalie a survolé son accouchement qui a duré trois heures, les comptines aux textes inappropriés que chante sa propre mère à l’enfant, son absence de relations sexuelles pendant un certain temps et son envie d’allaiter par paresse, parce qu’elle n’a pas le goût de nettoyer les biberons vides. Elle a même dédié son gala Juste pour rire 2022 à sa progéniture, en la blâmant de ne pas encore avoir l’argent pour subvenir à ses propres besoins. Adorable (ou presque!)
En fin de piste, comme l’an dernier, Katherine Levac – qui a elle aussi accouché dans la dernière année, de jumeaux – est venue rejoindre sa bonne copine pour poursuivre la conversation sous le thème de la maternité. C’était absurde, mais on a déjà vu les filles plus percutantes lorsqu’elles se produisaient en duo… jusqu’à ce que Gabrielle Destroismaisons ne fasse irruption pour interpréter son grand succès Et Cetera, apparemment une berceuse de prédilection chez les Vaillancourt et les Levac.
Drôles de mathématiques
Suzie Bouchard (qui a un nom d’enfant de film québécois dans les années 1980, dixit Rosalie Vaillancourt) a été la première invitée à prendre la parole. Partant de sa crainte de vieillir et mourir seule («J’ai en haut de 30 ans, je suis célibataire, je n’aime pas beaucoup sortir de chez nous et ma dernière fréquentation m’a volé des ustensiles»), celle qui commence à se distinguer pour ses talents de stand up après avoir cartonné comme auteure a ensuite tourné en dérision les paroles des parents trop fous de leurs enfants. Zen, d’un ton pince-sans-rire, en pleine maîtrise de ses moyens, Suzie Bouchard a aussi abordé une ancienne passion pour la religion, qui s’est muée en addiction à MusiquePlus. Elle a été parfaite.
Le décalé humour à dessins de Jean-Michel Martel a fait mouche. En faux professeur de mathématiques, le garçon au minois stoïque a proposé des opérations sans queue ni tête, projetées à l’écran. Par exemple, si un papa séparé a le droit de voir ses enfants une fin de semaine sur deux, mais que le nouveau conjoint de la maman possède une trampoline, «c’est quoi les chances que les enfants se câl*ssent de mon jeu de Skip-Bo?», a exposé le «savant» pédagogue. Le public a formidablement bien réagi à sa leçon d’un soir.
Jean-Sébastien ou Marie-Soleil?
À l’occasion de son tout premier gala Juste pour rire, la savoureuse Véronique-Isabel Fillion a révélé qu’elle partage son temps entre l’humour et la fabrication de savons artisanaux. Mais son art n’a pas occupé une longue partie de son monologue : elle a vite bifurqué vers les messages d’internautes, dont l’un lui demandait si elle est chatouilleuse, un autre d’un homme qui lui déclarait être heureux de ne pas être son père, et un autre encore d’un drôle d’individu qui lui relatait avoir eu un «semi» en la regardant. «Je vais mettre ça au clair : je ne fais pas ça pour vous faire bander. Surtout pas à moitié!», a statué Véronique-Isabel, attachante à souhait avec son air naïf, capable de dégainer de judicieuses observations. Autre enseignement important de sa tirade : si vous avez envie de commenter l’apparence de quelqu’un, abstenez-vous.
«Quand j’étais petit, ma mère ne m’aimait pas beaucoup», a annoncé Jean-Sébastien Girard, actuellement en rodage pour son premier one man show. Le grand nostalgique a brandi une photo de lui à sept ans, en col roulé, arborant une fournie permanente, pour prouver ses dires. «J’ai l’air de m’appeler Carmen (…) et d’être le meilleur ami de la madame qui fait des annonces pour la CAQ!» Girard a surfé sur les anecdotes de son enfance tout le long de son segment, au grand bonheur de l’assistance. Le portrait de lui en sosie de Marie-Soleil Tougas, avec le look d’une «activiste de l’UQÀM», était particulièrement surprenant.
Colin Boudrias, que Rosalie Vaillancourt s’enorgueillissait de présenter comme une précieuse découverte, a intelligemment confronté quelques-uns de nos préjugés sur l’âge, en riant des phrases toutes faites et en parlant de son rapport avec son grand-papa, qu’il compare à un vieux iPod. Ce Colin Boudrias était peut-être inconnu de quelques-un.e.s samedi, mais son nom et son charisme ne devraient pas rester secrets très longtemps.
Adib se répète
Adib Alkhalidey achevait son marathon de huit galas Juste pour rire d’affilée (deux par soir depuis mercredi, il figurait aussi à la liste de convives des rendez-vous de Pierre-Yves Roy-Desmarais, Roxane Bruneau et Phil Roy, et Richardson Zéphir et Eddy King) et on se demande si l’artiste – généralement inspiré – a manqué d’idées et de matériel pour remplir autant de temps de glace. Car il a récupéré presque identiquement son numéro sur son déménagement à la campagne offert plus tôt cette semaine au gala de Pierre-Yves Roy-Desmarais. On peut comprendre que le défi de mitonner du contenu frais pour quatre soirs consécutifs pouvait être difficile, mais on se déçoit pour les spectateur.trice.s qui ont peut-être assisté aux deux soirées et qui n’ont pu qu’entendre Adib se répéter, presque à la ligne près.
Le festival Juste pour rire se poursuit jusqu’au 31 juillet.