Un an après la fermeture des frontières, quels enjeux pour l’immigration?
Si les frontières internationales sont maintenant fermées depuis presque un an en raison de la pandémie, les démarches d’immigration se poursuivent au Canada. En revanche, la crise a forcé certaines personnes à reporter leur projet d’immigration.
Selon l’avocate spécialisée en droit de l’immigration et mobilité internationale chez Immétis Natacha Mignon, il y a de la «confusion» entre la fermeture des frontières et la poursuite des démarches d’immigration.
«En fait, tout au long de la crise, le traitement des demandes de permis de travail et des demandes de résidence permanente s’est poursuivi de façon relativement normale avec des délais certes… Mais je dirais qu’actuellement ça va quand même bien», explique-t-elle.
D’ailleurs, depuis août dernier, Me Mignon observe une forte demande des employeurs en matière d’immigration. En effet, les frontières sont encore ouvertes aux travailleurs étrangers qui ont une offre d’emploi.
«Ce qu’on constate aujourd’hui, malgré le taux de chômage qui a augmenté dans certaines régions, c’est un besoin criant de main-d’œuvre des employeurs canadiens», émet-elle.
La crise a freiné l’appétit de certains
Toutefois, Me Natacha Mignon souligne que la pandémie a pu freiner l’appétit de certains.
«Vous avez des personnes qui ont pu remettre à plus tard leur projet d’immigration compte tenu du fait qu’il y avait cette fermeture des frontières. Elles savaient que si elles émigraient pendant la pandémie, elles auraient plus de mal à faire des allers-retours avec leur pays d’origine», mentionne-t-elle.
D’ailleurs, les chiffres de Statistique Canada publiés en décembre démontrent que la croissance de la population s’est pratiquement interrompue.
Bien qu’on puisse croire que cela s’explique par la hausse des décès due à la pandémie, ce serait plutôt les pertes migratoires internationales qui expliqueraient cette stagnation démographique.
Une expérience d’immigration différente
Il est certain que l’expérience des immigrants arrivés au Canada durant la crise ou même un peu avant est différente, souligne Me Natacha Mignon. «Quand on arrive comme immigrant, on découvre les festivals, on découvre les week-ends aux États-Unis, on se fait tout un groupe d’amis, dit-elle. Mais les immigrants qui sont arrivés depuis mars dernier, ce n’est pas ce qu’ils ont vécu.»
C’est le cas de Lorine Benoit, une Française venue s’installer à Montréal avec son conjoint en janvier 2020.
L’immigrante confie que la pandémie a complètement bouleversé ses plans de découvrir le Canada et ses alentours. «Quand on change de pays, on se fait tout une idée de tout ce qu’on va pouvoir faire [dans notre pays d’accueil]. Surtout au Canada, il y a la possibilité notamment d’aller aux États-Unis donc on prévoit des voyages, on prévoit de découvrir», raconte-t-elle.
Dans les premières semaines de son arrivée au pays, Lorine Benoit s’est occupée des tâches administratives, comme trouver un logement et ouvrir un compte bancaire. «Ça passe très vite et on ne prend pas le temps de découvrir au début. On se dit qu’on va faire ça après», dit-elle.
Mais aussitôt installée, la Française a dû se confiner. «C’était très particulier d’être dans un endroit qu’on ne connaît pas, très loin de sa famille, dans un appartement qu’on n’a pas choisi en se disant qu’on allait y rester 24 heures sur 24», explique Mme Benoit.
C’est d’ailleurs le fait de ne pas pouvoir retourner dans son pays d’origine et voir ses proches qu’elle trouve le plus difficile.
Un an plus tard, Lorine Benoit pense qu’elle aurait remis ses plans d’immigration à plus tard si elle avait su ce qui arriverait. «Quand on change de pays, on laisse tout derrière soi. Donc je comprends tout à fait que certains reportent leur projet d’immigration et j’aurai fait pareil», affirme-t-elle.