La bataille juridique opposant les commissions scolaires anglophones et le gouvernement Legault a atteint son point culminant jeudi, alors que les trois juges de la Cour d’appel ont tranché en faveur des commissions dans le cadre de la Loi 40.
Ainsi, le projet de transformer les commissions scolaires anglophones en centres de services scolaires – une situation déjà concrétisée du côté francophone – devra demeurer sur la glace jusqu’à nouvel ordre.
«C’est un grand jour pour les minorités linguistiques au Québec», a dit Greg Kelley, le porte-parole libéral pour les questions touchant la communauté anglophone.
En mai, l’Association des commissions scolaires anglophones du Québec (ACSAQ) a déposé une demande d’injonction contre la Loi 40 à la Cour supérieure du Québec, en espérant suspendre l’application de la loi. La Cour supérieure lui a donné raison, une décision confirmée jeudi par le plus haut tribunal du Québec.
L’ACSAQ regroupe les neuf commissions scolaires de langue anglaise de la province.
Selon l’association et ses avocats, la Loi 40 enfreint les droits constitutionnels de la minorité anglophone du Québec, qui a le droit de gérer son propre réseau scolaire.
Même si le juge Sylvain Lussier a tranché en faveur de l’ACSAQ le 10 août, la victoire aura été de courte durée. Quelques jours plus tard, le provincial avait annoncé son intention de faire annuler la décision par la Cour d’appel du Québec.
Le gouvernement Legault avait annoncé son intention de porter en appel l’injonction accordée par la Cour supérieure. En cour, le gouvernement a avancé que la Loi 40 ne menace pas les droits touchant à l’éducation puisque les commissions scolaires ne sont pas abolies, seulement modifiées.
«Ce que vous obtenez de l’ACSAQ est une arnaque», a déclaré Chris Eustace, un ancien enseignant de la Commission scolaire Lester B. Pearson ayant plaidé en faveur du gouvernement lors de l’audience. «Les membres de l’ACSAQ se soucient uniquement de conserver leurs pouvoir. Ils ne se soucient ni des élèves ni des parents.»
La Cour d’appel a démonté l’argumentaire de Québec, disant que la loi compromet l’autonomie de la minorité anglophone en matière d’éducation.
«L’intérêt public tend en faveur de la protection des droits de la minorité linguistique officielle plutôt que vers la mise en œuvre du projet de Loi 40 dans le secteur de l’éducation. Du moins jusqu’à ce qu’il y ait un jugement sur le fond», ont conclu les juges dans le compte rendu de leur décision de 20 pages.
Ainsi, cette décision maintient la suspension jusqu’à ce que l’affaire puisse être discutée sur le fond. Ce qui ne se produira probablement pas avant plusieurs mois.
«La décision du tribunal montre exactement pourquoi il est important pour les Anglophones de se lever et de se battre pour leurs droits», souligne fièrement M. Kelley.
Élections scolaires
Les élections au sein des commissions scolaires de l’ACSAQ sont prévues pour le 1er novembre. Toutefois, puisque le projet de Loi 40 est en suspens, le président de l’ACSAQ, Russell Copeman espère reprogrammer ces élections dans l’attente d’une décision finale quant au bien-fondé de l’affaire.
«Si tous les groupes des commissions scolaires anglophones demandent au gouvernement de reporter ces élections, cela voudra dire clairement quelque chose», précise-t-il. «Il est impossible que la préparation de ces élections, y compris la campagne électorale, puisse avoir lieu avant novembre.»
«Comment pouvons nous mettre en place ces élections en pleine pandémie mondiale et en pleine procédure judiciaire?», a demandé M. Kelley.
L’association demande au gouvernement du Québec de les reporter en 2021 et d’étendre les mandats des membres actuels de la commission en attendant la tenue des prochaines élections.
Les commissions francophones de la province, appelées désormais centres de services, ont pour leur part décidé de ne pas contester le projet de Loi 40. Ainsi, il n’y aura plus de scrutin pour élire les membres de l’administration.