Au mois de juin, Sydney Freeston, une maman de l’Ouest-de-l’Île, a demandé dans un groupe Facebook d’entraide parentale si des activités familiales étaient prévues à l’occasion de la Fierté. Faisant face à plusieurs réponses homophobes, Mme Freeston et deux autres mamans – toutes hétérosexuelles – ont décidé d’organiser leur propre évènement, Family Pride Montréal.
L’évènement, qui doit se tenir le 27 août de 10h à midi, aura lieu au Temple Emanu-El-Beth Sholom, dans Westmount. La salle est prêtée aux organisatrices par la Rabbine Lisa Grushcow, elle-même dans une relation homosexuelle, qui tient des célébrations inclusives aux communautés 2SLGBTQ+, comme le «Sabbat de la Fierté». Family Pride Montréal souligne ne pas être un évènement religieux.
Au programme, bricolages et maquillages à thématique arc-en-ciel, histoires et contes «portant sur l’inclusion et les différentes formes que peut prendre une famille», jeux gonflables et collation, le tout sous la thématique «Love is love», ou «L’amour, c’est l’amour», en français. Il est spécifié dans la description de l’évènement qu’il est «familial».
Les activités s’adressent à un public âgé entre 2 et 12 ans. Les adultes devront débourser une somme de 15$ pour assister à l’évènement. L’entrée coûtera 10$ pour les enfants de trois ans et plus et sera gratuite pour ceux âgés de moins de trois ans. Le prix des billets servira à payer les agents de sécurité alors que les fonds excédentaires seront versés à l’organisme Rainbow Railroad.
Les personnes LGBTQ seront les bienvenues, et les alliés aussi! C’est un évènement pour montrer que bien que nous n’aimons pas tous les mêmes personnes, au bout de la ligne, nous sommes tous les mêmes.
Sydney Freeston, une des organisatrices de Family Pride Montréal
Une programmation qui oublie les jeunes enfants?
Mme Freeston a deux jeunes enfants: Holden, deux ans, et Isabelle, quatre ans. Bien qu’elle soit elle-même hétérosexuelle, la maman souhaite leur offrir «une vue d’ensemble» des différentes orientations sexuelles. Elle assure avoir épluché la programmation de Fierté Montréal et avoir la ferme intention d’amener ses enfants au défilé.
«Le mois de juin est le mois de la fierté partout dans le monde, explique Mme Freeston. À ce moment-là, il n’y avait vraiment pas d’activités reliées à la Fierté pour cet été à Montréal». Au Québec et en Colombie-Britannique, notamment, la fierté est célébrée au mois d’août.
La maman explique qu’elle aurait aimé retrouver dans la programmation du festival des activités semblables aux heures du conte avec des drag queens. Questionnée à ce sujet, la Coalition des familles LGBT soutient qu’une heure du conte est souvent organisée pendant la Fierté, mais que cette année fait exception. Fierté Montréal n’a pas pu répondre aux demandes de Métro, occupé par le lancement des festivités.
Quand on se penche sur la programmation du festival, parue à la fin mai, on constate que les journées communautaires offrent des installations pour enfants comme des jeux gonflables et que certains kiosques, comme celui de la Coalition des familles LGBT+, offriront du matériel de bricolage.
Une fine ligne sur laquelle marcher
Lorsque questionnée quant au fait que les organisatrices de l’évènement ne font pas partie des communautés 2SLGBTQ+, Sydney Freeston souligne que «des membres de ces communautés participeront à cet évènement. Si ça fonctionne bien cette année, nous aimerions qu’il revienne annuellement et avoir plus de bénévoles issues de la communauté pour donner un coup de main».
Pour l’instant, nous sommes simplement heureuses de démontrer que nous sommes des alliées
Sydney Freeston, une des organisatrices de Family Pride Montréal
Bien qu’elle comprenne que les organisatrices de l’évènement sont bien intentionnées, la relationniste de la Coalition des Familles LGBT+, MD Dussault, souligne que «des personnes straight qui organisent un évènement pour la communauté LGBT, c’est marcher sur une ligne bien mince». Parce qu’il faut être en mesure d’offrir un environnement sécuritaire et accueillant aux personnes concernées et s’assurer que la représentation qu’on fait d’elles et de leur famille soit fidèle à la réalité, fait-elle valoir.
«Du monde straight qui organise un évènement qui concerne la communauté LGBT+, c’est comme si des personnes blanches organisaient un évènement pour des personnes noires. Ça peut être sensible», image MD Dussault.
Elle tend la main vers les organisatrices de Family Pride Montréal, les invitant à se tourner vers son organisme qui pourrait «les épauler dans leurs démarches», mettant de l’avant l’importance d’impliquer les personnes concernées dans ce type d’évènement. Elle ajoute que la coalition se rend disponible aux parents cherchant ce type d’activités pour leurs enfants.
Quant au slogan «Love is love», Mme Dussault rappelle que «le mouvement est rendu un peu plus loin. Oui, l’amour, c’est l’amour, mais en mettant ça de l’avant, on peut oublier certaines personnes derrière», comme les communautés QTBIPOC et les différentes identités de genre. Elle comprend toutefois que pour des enfants n’étant pas encore en âge d’aller à l’école «l’amour, c’est l’amour» peut être suffisant. «Ils ne savent même pas encore c’est quoi un système!» dit-elle.
Des activités pour tous les âges
MD Dussault assure qu’en plus du défilé, tous les spectacles se déroulant sur la scène extérieure sont grand public. «Les spectacles qui sont considérés pour adultes vont tous se dérouler en salles».
Sont également au programme des «Espaces bienveillants» pour la jeunesse, situés loin de la foule et sans alcool. Le premier, organisé «par et pour les jeunes de la diversité sexuelle et de genre de 14 à 25 ans» se veut un lieu accueillant et calme, axé sur le respect et la compassion. L’Espace bienveillant QTBIPOC, lui, accueille les personnes queers, trans, noires, autochtones et racisées dans un environnement sécuritaire.
Aux parents nerveux à l’idée d’amener leurs enfants au défilé de peur de voir des personnes en tenues légères ou rappelant différents fétiches sexuels, MD Dussault rappelle que ce type d’accoutrement est rependu dans de nombreux festivals. Pour répondre aux questions des enfants, elle suggère de préparer en avance des réponses aux questions sensibles.
«Si votre enfant pose des questions au sujet de personnes habillées en furry ou en suit d’animal en cuir, on peut tout simplement leur expliquer que ces gens-là sont déguisés», donne-t-elle en exemple.
La Rabbine Lisa Grushcow n’a pas retourné les appels de Métro.