Le SPVM voudrait réduire sa présence dans les écoles
Le 21 juin dernier, le chef du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) a rencontré les communautés noires à la veille de la sortie d’un rapport sur le profilage racial et les interpellations policières. Fady Dagher n’avait pas de bonnes nouvelles, car depuis 2014, la situation n’a pas bougé plus que cela.
Mais pire encore, la communauté dit avoir un sérieux problème avec la présence de la police dans les écoles secondaires, et même au primaire. Pour le président du Sommet socioéconomique des jeunes des communautés noires (SdesJ), Édouard Staco, la police est en train de stigmatiser les jeunes et doit battre en retraite.
«On a une inquiétude par rapport à la présence policière. La police a un mandat de prévention, oui, mais on est en train de stigmatiser les enfants de plus en plus jeunes», soutient M. Staco, aux côtés de son invité, Fady Dagher.
Le chef de la police acquiesce. Il va même jusqu’à dire qu’il n’a pas envie d’être là et qu’il «n’a pas besoin d’être là», mais exige une alternative à sa présence dans les écoles.
La police ne doit pas s’occuper de tout ce qui est prévention partout. On doit sortir des écoles, de certaines interventions. Si on m’appelle, je dois y aller, mais ce n’est pas à moi de m’occuper de tout cela.
Fady Dagher, chef du SPVM
Le 911 débordé
La police reçoit énormément d’appels au 911 en provenance des établissements scolaires, confirme le chef du SPVM. «Si on m’appelle, je dois y aller, explique M. Dagher, c’est dans mon mandat comme policier.» La plupart du temps, ce sont les directions ou le personnel qui passent ces coups de fil.
«Lorsqu’il y a danger ou menace, on nous demande de faire le 911. Ce sont des intervenants ou des directions qui font cet appel», nous confirme le porte-parole de l’un des trois centres de services scolaires de Montréal, Alain Perron.
Pourtant, il existe sur place des ressources de la sorte qui pourraient intervenir dans la majorité des cas, rappelle le SdesJ. Le Centre de services scolaire de Montréal (CSSDM) le confirme aussi. «Oui, même plus, psychoéducateurs, techniciens en éducation spécialisée, et la collaboration des organismes communautaires et des médiateurs urbains», précise le centre de services scolaire.
Mais dans les milieux défavorisés, la police intervient de façon disproportionnée dans les écoles, fait remarquer le président de SdesJ. Souvent pour des cas de toxicomanie, de sexualité ou pour des situations qui pourraient être réglées par des spécialistes formés en la matière.
Moi, je veux sortir, mais mettez quelqu’un. Trouvez-les et je vous jure que je vais sortir.
Fady Dagher, chef de la police de Montréal
La directrice générale du Bureau de la communauté haïtienne (BCHM), Ruth Pierre-Paul, qui offre un programme «Option protection» à la DPJ, affirme qu’une bonne partie des cas traités à son bureau viennent des écoles. «Ce sont les écoles qui signalent», a-t-elle insisté lors de la rencontre avec Fady Dagher.
Danger ou profilage racial?
Au CSSDM, le protocole veut qu’«en cas de réel danger, toute personne témoin soit autorisée à faire le 911». Édouard Staco admet que, en effet, lorsqu’il y a une menace à la vie ou que la police dispose d’un mandat, elle doit intervenir.
«Mais, ce ne sont pas des interventions de cette nature dont on parle, mais d’individus qui veulent donner une leçon à un jeune», estime M. Staco, qui croit que la police le fait de façon disproportionnée dans les écoles de milieux défavorisés, beaucoup plus qu’ailleurs.
Notons que toutes les écoles ne réagissent pas de la même manière face à une même situation. Un directeur d’école, qui a souhaité garder l’anonymat et avec qui Métro a discuté du protocole établi dans son établissement, nous confie que la responsabilité d’appeler la police lui revient uniquement.
Par cette décision, il entend prévenir toute situation de profilage racial et de racisme qui pourraient provenir du personnel de l’école.