Vague d’annulations dans les restaurants de Montréal à l’approche de Noël
Alors que la Santé publique de Montréal recommande à tous les Montréalais de limiter leurs contacts et d’annuler les rassemblements avant les Fêtes, des restaurateurs doivent composer avec des annulations de réservations de groupe.
Devant une potentielle hausse des cas de COVID-19 et la menace du nouveau variant Omicron, plus transmissible et résistant aux vaccins, le gouvernement du Québec a demandé aux citoyens de redoubler de vigilance. Il recommande même le télétravail, et ce, moins d’un mois après avoir encouragé le retour au bureau.
Depuis l’annonce de mardi du ministre Dubé, des entreprises ont décidé d’annuler leurs activités des Fêtes. Souvent, ces activités devaient se tenir dans des restaurants, indique le directeur des affaires publiques et gouvernementales pour l’Association Restauration Québec (ARQ), Martin Vézina. «Il y a des cas ici et là qu’on voit. Est-ce que c’est généralisé? C’est encore difficile à dire», précise-t-il.
Annulations en bloc
Toutes les réservations de groupe prévues pour jeudi au restaurant La Raclette, situé dans le Plateau-Mont-Royal, ont été annulées, mentionne le serveur d’expérience Vincent. «Il n’y a pas de problème avec les petites tables, mais c’est les partys de bureau [qui annulent]. On a dû perdre une trentaine de personnes en tout», affirme-t-il.
L’établissement n’est pas le seul dans cette situation. Le propriétaire et directeur général du restaurant Le Richmond, Ertan Eren, raconte que seulement entre mardi et mercredi, il a reçu l’annulation de trois groupes de 25 personnes qui devaient faire leur party de Noël mercredi midi. Et le groupe de 115 personnes qui devait venir ce mercredi soir a aussi annulé cet après-midi», ajoute-t-il.
«Les clients expliquent qu’ils préfèrent suivre les recommandations du gouvernement pour ne pas prendre de risques», mentionne-t-il.
Le Riverside, un établissement situé près du canal Lachine qui accueille en grande partie des événements privés, doit aussi composer avec ces imprévus. Un gros événement planifié le jeudi 16 décembre a été annulé. Un autre, jusqu’à maintenant prévu vendredi, devient de plus en plus incertain. « Je comprends pourquoi, mais pour l’industrie, c’est plate parce qu’il y a des annulations à droite et à gauche», souligne le propriétaire, Justin Jolin.
À Villeray, le restaurant Le Coin G a eu mercredi une annulation de cinq personnes et une autre de neuf personnes, à cause des nouvelles mesures annoncées. Jeudi matin, l’établissement devait également accueillir 45 personnes, un événement décommandé lui aussi.
Carlos Valderrama, le gérant de la pizzeria GEMA dans la Petite-Italie, rapporte que plusieurs grands groupes ont dû annuler leurs réservations au courant des dernières semaines. Plusieurs de ces désistements ont eu lieu parce qu’un membre de ces groupes a contracté la COVID-19, précise-t-il.
Le gérant du restaurant À l’arrêt, Gallo Lojo, voit les choses d’un œil plus serein, bien que le lieu ait connu quelques annulations. « Je n’ai pas peur parce qu’on a toujours trouvé des solutions. On ne va pas se laisser abattre», dit-il.
Impacts financiers
Martin Vézina de l’ARQ souligne que les annulations peuvent, dans certains cas, avoir une incidence sur le chiffre d’affaires des restaurateurs. Si on annule une réservation qui a été faite sans contrat ni clause de dédommagement, la vente tombe à l’eau, explique-t-il. «Pourtant, [le restaurateur] a planifié la nourriture et le personnel en place», poursuit-il.
En effet, l’une des employées du Coin G, Cynthia Gagnon, a expliqué à Métro que les annulations auront un impact financier sur l’établissement. «Il y a pas mal tout le revenu qui part d’un coup. Habituellement, le temps des Fêtes, c’est le moment où l’on a des groupes. Mais malheureusement, maintenant ça crève un peu dans l’œuf.»
Elle ajoute qu’il se pourrait alors que le restaurant ferme une ou deux journées de plus pendant l’hiver.
Pour Ertan Eren, propriétaire du Richmond, les annulations de la journée du mercredi représentent au moins 40 000 $ en pertes financières, sans compter les achats de nourriture et de boissons qui ont été réalisés.
La récente annonce du gouvernement a aussi touché le milieu de l’événementiel. La compagnie Next Entertainment fournit des animateurs et du matériel pour les soirées. Elle a reçu 20 annulations en trois jours. «On parle environ d’une facture de 65 000 $. […] Maintenant il n’y a plus d’employés. Je dois tout restructurer encore une fois», explique le président de la compagnie, David Azeroual. Il ajoute qu’il devra mettre en pause ses activités pendant quelques semaines.
Craintes de fermetures
Une chose est certaine: les restaurateurs espèrent seulement ne pas avoir à fermer complètement de nouveau. D’ailleurs, Martin Vézina rappelle que les restaurants sont des lieux sécuritaires. «On a des mesures sanitaires en place et, contrairement à des partys de bureau, des salles de réunions ou d’autres endroits, on applique le passeport vaccinal. On est dix par table et on porte le masque si on circule.»
Nancy Collin, propriétaire du restaurant L’Estaminet, situé sur la Promenade Fleury, pense même que le retour du télétravail obligatoire pourrait être positif pour son restaurant, si les salles à manger demeurent ouvertes. «J’espère seulement qu’on ne reconfinera pas et que je ne serai pas obligée de remettre des employés à pied […] J’ai besoin que ça reste stable. J’ai une belle équipe, on est ouvert sept jours sur sept et je suis contente», dit-elle.
De son côté, M. Valderrama demeure stoïque. «En ayant discuté avec plusieurs amis qui sont dans la restauration, c’est une réalité qu’on ne peut pas vraiment éviter, souligne-t-il. Autant y aller à l’unisson, au jour le jour, puis s’orienter par rapport à la situation. Si on a à fermer et s’en remettre à la livraison ou aux repas à emporter, ce sera ça, on ne peut pas vraiment s’en sauver.»
Avec la collaboration de Alicia Casteras, Émile Bérubé-Lupien et Lila Maitre.