Des éclosions majeures de COVID-19 au sein de la population itinérante, touchant particulièrement la communauté autochtone, forcent l’ouverture de nouveaux lits et l’embauche de nouveau personnel à l’ancien hôpital Royal Victoria.
Selon les intervenants consultés par Métro, le problème généralisé au sein de la population itinérante est représentatif de l’augmentation des cas à Montréal.
«Ce sont des gens qui se promènent beaucoup. L’éclosion est au sein de la communauté itinérante et non au sein d’une ressource. Quelqu’un qui est positif, s’il quitte ma ressource peut aller dans la rue», explique la directrice générale du refuge Projets Autochtones du Québec (PAQ), Heather Johnston.
Celle-ci indique que la moitié des usagers testés ont été déclarés positifs durant le congé des Fêtes.
La situation est pire au refuge Open Door, qui n’a pas rouvert ses portes depuis le 17 décembre. Près de 30 tests sur 70 se sont avérés positifs, explique le coordonnateur de l’équipe d’intervention, John Tessier.
«On travaille fort avec la Santé publique pour gérer l’éclosion, émet Heather Johnston. On veut s’assurer que tout le monde a un endroit pour s’isoler et recevoir les soins dont il a besoin.»
20 lits de plus au Royal Victoria
Si un sans-abris reçoit un test positif de coronavirus, il va à l’ancien hôpital Royal Victoria, transformé en unité d’isolement. Avec les récentes éclosions, les 30 lits se sont remplis et le manque de place s’est rapidement fait ressentir.
Dès mercredi, près de 20 lits supplémentaires seront ajoutés à Royal Victoria, indique la directrice des services du campus Saint-Laurent à la Mission Old Brewery, Émilie Fortier. «Le but est de répondre à la demande du fait qu’il y a plusieurs dépistages prévus dans les organismes», détaille Mme Fortier.
Celle-ci parle d’un taux de positivité de 50% à 80% au sein des personnes itinérantes dépistées.
Impossible de dire si le nombre de lits sera suffisant, souligne cependant Heather Johnston. «On ne connaît pas l’ampleur de l’éclosion, mais je soupçonne que ça va être assez», dit-elle.
La population itinérante, par définition, n’a toutefois pas d’endroit pour s’isoler. Le manque de place inquiète donc John Tessier, qui espère rouvrir Open Door le plus rapidement possible. «S’il y a un couvre-feu, où vont-ils aller? demande-t-il. On espère vraiment qu’on puisse rouvrir 24 heures sur 24 spécifiquement pour les gens qu’on dessert.»
Services adaptés
Par ailleurs, opérer un endroit, comme le Royal Victoria, dédié à la population itinérante est un énorme défi, estime le gestionnaire de projet à Resilience Montreal, David Chapman. «Ce n’est pas simple d’ouvrir des espaces pour que les gens puissent s’isoler quand ces gens ont des maladies mentales spécifiques, des dépendances et des traumatismes», explique-t-il.
C’est pourquoi on embauche actuellement du nouveau personnel pour offrir des services adaptés à la population desservie au Royal Victoria , indique Émilie Fortier. Bien que les équipes ne soient pas encore complètes, l’objectif est d’avoir 6 à 8 intervenants par quart de travail, en plus du personnel médical.
«On parle de gens, dans certains groupes, qui vivent des problèmes de dépendance très importants, dit-elle. On ne pouvait pas les accueillir jusqu’à la semaine dernière parce qu’on n’avait pas le personnel médical pour gérer des sevrages ou des risques de sevrage, ni le personnel d’intervention pour gérer les comportements qui viennent avec les niveaux d’intoxication très élevé.»
Dès mercredi, des équipes médicales seront sur place pour évaluer le besoin d’alcool des patients de la zone rouge.
Réalité autochtone
Émilie Fortier affirme que les présentes éclosions surviennent dans la population de rue qui ne fréquente pas nécessairement des ressources d’hébergement.
«Dans cette population, la population autochtone est surreprésentée», ajoute-t-elle. L’objectif est donc aussi d’embaucher des intervenants qui sont familiers avec les réalités autochtones.
Heather Johnston du PAQ pense aussi qu’il est primordial d’avoir des services adaptées à la communauté autochtone. «Il faut une ressource qui réponde à leurs besoins et à leur réalité, des intervenants qui parlent leur langue ou peut-être qui les connaissent», estime-t-elle.