Afin d’atteindre ses cibles ambitieuses de réduction des gaz à effet de serre (GES), la Ville de Montréal entend miser sur un virage électrique des déplacements, notamment au centre-ville, des normes énergétiques strictes pour les bâtiments et la plantation de 500 000 arbres d’ici 2030.
L’administration de Valérie Plante a dévoilé jeudi son Plan climat, qui prévoit des investissements de plus d’un milliard d’ici 10 ans. Celui-ci dresse 46 mesures qui visent à permettre à la Ville de réduire ses émissions de GES de 55% d’ici 2030 et de rendre la métropole carboneutre d’ici 2050.
Sur l’ensemble de ces engagements, cinq devraient permettre à Montréal d’atteindre plus de 70% de ses cibles de réduction des GES à Montréal. Ceux-ci concernent les secteurs du transport et des bâtiments.
D’une part, la Ville se donne comme cible de réduire de 25% la part de l’auto-solo dans les déplacements à Montréal d’ici 2030. La marche est haute, alors que la voiture continue d’être le mode de transport favori des résidents de la région métropolitaine pour la majorité de leurs déplacements.
«Ce qui arrive à Montréal actuellement, c’est qu’il s’ajoute des dizaines de milliers de véhicules chaque année alors qu’on suffoque déjà», a lancé jeudi le président-directeur général de la Fondation du Grand Montréal, Karel Mayrand. Ce dernier a pris part à 13h à une conférence de presse au centre-ville en présence de la mairesse de Montréal, Valérie Plante.
Moins de stationnements
Pour atteindre cette cible, la Ville entend notamment diminuer le nombre de places de stationnements disponibles près des stations de métro de la métropole, ce qui devrait décourager certains à prendre leur voiture. Cette mesure s’appliquera tant aux stationnements publics que privés à ces endroits.
La Ville compte aussi augmenter l’offre de mobilité plus verte – comme le transport en commun et le covoiturage – dans les secteurs en développement, parmi lesquels on compte le site de l’ancien hippodrome Blue Bonnets.
«Pour moi, le fait d’avoir du transport en commun structurant, c’est une des clés. Ce qui encourage les gens à prendre leur voiture, c’est quand il n’y a pas assez d’options», a évoqué jeudi après-midi la mairesse de Montréal, Valérie Plante, en conférence de presse au centre-ville.
«On veut que la voiture ne soit plus essentielle», a aussi affirmé la responsable de la transition écologique au comité exécutif, Laurence Lavigne Lalonde.
Une zone «zéro émission» au centre-ville
Alors que moins de 2% des déplacements à Montréal sont effectués en véhicules électriques, selon la Ville, le plan se donne comme cible de faire grimper à 47% la part de véhicules électriques immatriculés à Montréal d’ici 2030. Pour faciliter cette transition, l’administration municipale compte notamment étendre la présence de bornes de recharge publiques à l’ensemble de la métropole. Actuellement, on en dénombre plus de 1500 sur l’île de Montréal, dont près de 900 dans la ville.
Par ailleurs, la Ville réalisera des consultations dans les prochaines années en vue d’établir une zone «zéro émission» au centre-ville. Les détails de celle-ci demeurent à définir, mais il s’agirait potentiellement d’un secteur considérable du centre-ville où seuls les modes de transport écologiques pourraient circuler, incluant les voitures électriques. Cette zone devrait voir le jour en 2030.
«Évidemment, ça se fera par étapes», a assuré Mme Plante, qui n’a d’ailleurs pas voulu s’avancer sur la possibilité qu’un système de péage soit mis en place pour décourager les voitures à essence à entrer dans cette zone.
Pour l’opposition officielle, ce projet n’est rien d’autre qu’une «campagne de pub».
«On choisit un secteur pour atteindre une cible zéro émission dans un petit quadrilatère alors qu’il faut agir dans l’ensemble de l’île. On crée la nouvelle au lieu d’agir avec des cibles claires», a déploré le porte-parole d’Ensemble Montréal en matière d’environnement, Francesco Miele.
Le Plan climat prévoit en outre d’appliquer un «test climat» à l’ensemble des décisions de la Ville afin de forcer celle-ci à prendre des décisions écologiques, peu importe le parti au pouvoir.
«Ce qu’on veut, c’est que ce plan résiste aux administrations.» -Laurence Lavigne Lalonde, responsable de la transition écologique à la Ville
L’opposition officielle réplique toutefois que ce plan «n’a aucune valeur légale».
Des bâtiments plus verts
La Ville entend par ailleurs s’attaquer aux émissions de GES des bâtiments, tant publics que privés. L’administration entend notamment éliminer l’utilisation du mazout et réduire celle du gaz naturel comme énergie de chauffage. Les propriétaires auront aussi accès à du financement pour réaliser des travaux de rénovation écologiques, tandis que les grands bâtiments devront respecter des normes plus sévères en matière de production de GES.
«Montréal pourra donc progresser vers la carboneutralité avec des mesures axées sur les bâtiments existants et les nouvelles constructions qui accélèrent les réductions de GES», a salué le directeur des affaires gouvernementales au Conseil du bâtiment durable du Canada – Québec, Sylvain Perron, par voie de communiqué.
Par ailleurs, la Ville s’engage à planter 500 000 arbres d’ici 10 ans, à hauteur de 50 000 par année. Selon l’administration municipale, c’est nettement plus que ce qui s’est fait dans les dernières années à Montréal. La Ville entend d’ailleurs prioriser ses efforts de verdissement dans les endroits où on compte des îlots de chaleur.
«La résilience de nos milieux de vie passe par la nature, Plus d’arbres, de milieux naturels protégés et une protection des berges apportent de multiples bénéfices à l’ensemble de la population. La crise de la COVID-19 a aussi mis en lumière le rôle clé des espaces verts et de la nature pour le bien-être des Montréalaises et des Montréalais», a réagi dans une déclaration écrite le directeur général du Conseil régional de l’environnement de Montréal, Emmanuel Rondia.