Les pressions se font de plus en plus grandes envers la Ville de Montréal en faveur d’allègements fiscaux et réglementaires à l’égard des commerces de la métropole, durement ébranlés par la crise sanitaire du coronavirus.
La Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI) a déposé jeudi son mémoire dans le cadre des consultations entamées le mois dernier par la Ville. Celles-ci visent à outiller l’administration de Valérie Plante dans la rédaction de son prochain budget, attendu en novembre.
Au coeur des recommandations de l’association, qui représente quelque 110 000 PME à l’échelle du pays, se trouve l’enjeu de la fiscalité. Malgré la réouverture d’une majorité d’entreprises dans la métropole à la suite de la première vague, seulement 14% d’entre elles ont réussi à atteindre un niveau de ventes similaire à celui d’avant la pandémie, selon un récent sondage mené par l’organisation. Elles sont d’ailleurs nombreuses à dépendre des programmes d’aide financière d’Ottawa, comme la subvention salariale.
Allègements fiscaux
La FCEI presse donc la Ville de Montréal d’appliquer un gel de l’impôt foncier pour les immeubles non résidentiels dans son budget 2021. Cela ferait en sorte que les taxes municipales imposées aux commerçants de la métropole n’augmenteraient pas en fonction du taux d’inflation, comme c’est le cas annuellement. Une demande qui survient alors que la Ville appréhende des pertes financières pouvant dépasser le demi-milliard de dollars en raison de la crise sanitaire.
«Ça ne se fait pas en claquant des doigts [geler les taxes], mais cette réflexion doit être faite», fait valoir à Métro l’analyste principal des politiques à la FCEI, Gopinath Jeyabalaratnam. Ce dernier estime d’autre part que la Ville devrait permettre aux entreprises les plus fragilisées de pouvoir reporter le paiement de leurs taxes foncières pour l’année 2020-2021.
«Il y a des entreprises plus à risque qui pourraient avoir des ententes de paiement à la Ville pour reporter le paiement le plus tard possible», explique l’analyste. Ce dernier reconnaît toutefois que la Ville aura besoin de l’aide financière de Québec et d’Ottawa pour concrétiser ces allègements fiscaux, les villes n’ayant pas le droit de présenter un budget déficitaire.
Front commun
De telles demandes en matière d’allègements fiscaux pour les commerçants font d’ailleurs écho à celles de plusieurs autres associations de commerçants. C’est notamment le cas de l’Association des sociétés de développement commercial de Montréal (ASDCM) et de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, dont les mémoires font état de demandes similaires.
L’opposition officielle à l’hôtel de ville, Ensemble Montréal, déposera par ailleurs une motion à la prochaine séance du conseil municipal, le 21 septembre, pour presser la Ville d’appliquer une baisse temporaire des taxes municipales pour les commerces du centre-ville.
«La pression financière est plus forte que jamais sur les commerçants, donc ça devient plus important que jamais d’alléger leur fardeau fiscal», affirme à Métro la directrice générale de l’ASDCM, Caroline Tessier. Cette dernière demande par ailleurs à la Ville d’élargir les mesures d’allègement fiscal qu’elle a mis en place pour les petits commerçants l’an passé en appliquant celles-ci à la première tranche de 750 000$ des immeubles non résidentiels.
«Le but, ce n’est pas toujours de réduire [les taxes] pour tout le monde, mais de réduire l’injustice commerciale entre les petits commerçants et les grands commerçants.» -Caroline Tessier, directrice générale de l’ASDCM
Lourdeur administrative
La FCEI recommande d’autre part à la Ville de réduire le fardeau administratif des commerçants. Pour ce faire, elle propose entre autres que l’administration municipale applique un moratoire sur l’adoption de nouveaux règlements non essentiels pour faire face à la pandémie et mise sur «la numérisation des services» pour accélérer la délivrance de permis aux commerçants qui en font la demande.
«Il y a encore des arrondissements où il faut se rendre en personne pour obtenir un permis. Il y a des histoires interminables reliées au zonage», déplore Gopinath Jeyabalaratnam. Une situation qui fait perdre des heures précieuses aux commerçants, constate également Mme Tessier.
Cette dernière demande d’ailleurs à la Ville de conserver en 2021 certains allègements réglementaires mis en place cette année dans le contexte de la crise sanitaire. Les commerçants ont notamment pu obtenir à prix réduit cet été le permis nécessaire à l’aménagement d’une terrasse sur la voie publique.
«Les impacts de 2020 vont se poursuivre en 2021 et vont peut-être même s’accentuer en raison de la longévité de la crise. Donc ça, c’est une mesure concrète qui doit absolument faire un retour [l’an prochain]», estime-t-elle.
Contacté par Métro, le cabinet de la mairesse Valérie Plante a assuré qu’il étudie «toutes les solutions possibles» afin d’aider les commerçants «à traverser cette crise sans précédent».