Le nombre de familles qui sont toujours sans logement, au lendemain du jour du déménagement, est le plus élevé en 15 ans dans plusieurs municipalités, dont Montréal, s’inquiète le Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU). L’organisme, qui dressait jeudi son bilan traditionnel du 2 juillet, réclame que Québec entende enfin les besoins criants.
Dans la métropole, plus de 182 ménages n’ont toujours pas de bail. À cela, s’ajoutent près de 30 foyers dans l’agglomération de Longueuil et 34 autres à Laval. C’est donc dire que presque 250 familles pourraient se retrouver à la rue dans le Grand Montréal.
«Il faut remonter à 2003 pour avoir un chiffre aussi important, illustre la porte-parole du FRAPRU, Véronique Laflamme, en entrevue avec Métro. On dit depuis des mois que le problème d’inabordabilité à Montréal est en croissance. Dans plusieurs quartiers, la spéculation contribue à la crise, en chassant les plus vulnérables de leur logement.»
Des demandes d’aide en hausse
Au cours des dernières semaines, 1300 ménages ont fait appel aux services d’urgence des villes ou des organismes communautaires. Seulement à Montréal, on en compte 479, soit plus du double par rapport à l’an dernier. Environ 35% d’entre eux avaient subi une reprise de possession ou une éviction pour l’agrandissement d’un logement, selon les données du FRAPRU.
«Le problème de fond, c’est que Québec n’en a pas fait assez pour accélérer la réalisation de logements sociaux. 195 000 foyers locataires consacraient déjà, avant la pandémie, plus de la moitié de leur revenu au loyer. Ça risque d’augmenter.» -Véronique Laflamme, du FRAPRU
Son organisme presse le gouvernement de se doter d’une cible à long terme de réalisation de logements sociaux et abordables, à l’instar de la Ville de Montréal. Il faudrait «au minimum» prévoir 50 000 unités en cinq ans au Québec, dont presque la moitié dans la métropole, où presque 23 000 personnes sont sur la liste d’attente pour obtenir une habitation à loyer modique (HLM).
«On veut un grand chantier qui se planifie. Mais on n’est pas là du tout. Dans le dernier budget, il n’y a même pas d’investissement sur le développement de ces logements. Il y a un grand coup à donner», remarque Mme Laflamme.
La «pointe de l’iceberg»
Pour le coordonnateur au Regroupement des comités logement et associations de locataires (RCLALQ), Maxime Roy-Allard, la saison estivale sera certainement «très difficile» cette année, et beaucoup plus que d’habitude pour les familles au lendemain du déménagement.
«On a plus de demandes, et donc beaucoup plus de personnes qui se retrouvent sans ressources, en détresse. À un moment donné, les autorités vont devoir réaliser l’ampleur du problème et agir en conséquence.» -Maxime Roy-Allard, du RCLALQ
La Ville de Montréal, elle hébergera 43 ménages dans ses unités d’urgence. «Il faut vraiment garder en tête que c’est la pointe de l’iceberg. En réalité, il y a beaucoup plus de familles qui ont besoin d’aide, mais qui se débrouillent en allant rester chez des amis ou des proches. Et puis, des mesures d’urgence, c’est bien, mais après ces gens-là doivent se retrouver un logement», ajoute M. Roy-Allard.
Au cabinet de la mairesse Valérie Plante, on assure que tout sera mis en place pour minimiser les impacts. «On prend très au sérieux cette situation difficile. […] Aucun ménage n’est laissé à la rue. Nous nous assurons de leur offrir un toit pendant leurs recherches d’appartements permanents», assure la porte-parole, Laurence Houde-Roy.
Fin mai, Montréal a d’ailleurs augmenté les budgets de l’Office municipal d’habitation de Montréal (OMHM), qui traite les demandes d’accompagnement au logement. La Ville appelle les gens dans le besoin à communiquer avec le 311 «pour être redirigés aux bonnes ressources».
Québec veut en faire plus
Jointe par Métro, l’attachée de presse au cabinet de la ministre de l’Habitation, Bénédicte Trottier-Lavoie, affirme que le gouvernement est à pied d’œuvre pour «accompagner les familles dans le besoin».
«Nous avons répondu à 522 personnes pour les aider dans leur démarche de recherche. De ce nombre, 276 familles ont signé un bail et 246 ménages sont présentement hébergés temporairement. Nous sommes confiants de pouvoir leur trouver un chez soi bien à eux rapidement», avance-t-elle.
«À court terme, tout va relativement bien et c’est une opération réussie. À moyen et long terme, il faut rattraper le retard accumulé sous les anciens gouvernements pour ce qui est de la construction de logements sociaux et abordables.» -Bénédicte Trottier-Lavoie, porte-parole d’Andrée Laforest
Québec affirme que 2800 unités de logement social ont déjà été livrées, et que «d’autres le seront très prochainement».