«Quand un parti se retrouve en défaite, les couteaux volent bas»
La décision de Dominique Anglade de quitter la vie politique n’est pas une surprise pour de nombreux observateurs. La cheffe du Parti libéral du Québec (PLQ) a abandonné la direction de sa formation et quittera son poste de députée de Saint-Henri–Sainte-Anne après avoir mené le parti vers son pire résultat (14,37%) lors d’une élection provinciale, le 3 octobre dernier.
«Je m’attendais à ce que [sa démission] arrive la semaine dernière, après la mauvaise gestion de la “crise Nichols”. On l’expulse de façon cavalière et on lui tend une branche d’olivier… Cette gestion très malheureuse a précipité sa chute. Il y a eu contestation du leadership par au moins trois députés: la partie était terminée», décrit Patrick White, politologue et professeur de journalisme à l’Université du Québec à Montréal (UQAM).
Rappelons que Marie-Claude Nichols, plus ancienne députée libérale du caucus, avait été expulsée avant d’être rappelée quelques jours après la polémique. «Une erreur monumentale», selon le politologue André Lamoureux.
Avant la campagne, pendant la campagne et après, [Dominique Anglade] n’a jamais lâché. Elle a toujours donné l’impression de rebondir. C’est un chat à neuf vies: elle ne donnait pas de signes qu’elle allait baisser les bras.
Bernard Motulsky, politologue et professeur au Département de communication sociale et publique de l’UQAM
La chevauchée n’a pas été évidente pour la femme politique de 48 ans – «elle a résisté à beaucoup de pression en interne», rappelle M. Motulsky
La faute au parti?
Finalement, le départ était inévitable, affirme M. Lamoureux. La «zizanie» et les «déchirements» ont eu raison d’une cheffe de parti «pleine d’incohérences», avec «peu de caractère et de capacité à élaborer des politiques», à l’image de sa volte-face sur le gel temporaire des admissions dans les cégeps anglophones.
Bernard Motulsky, lui, ne s’attendait pas pour sa part à un départ précipité de Dominique Anglade. «J’ai l’impression que c’est plutôt au parti qu’il manque quelque chose. On voit un parti qui se cherche, qui a perdu sa boussole», illustre-t-il.
Privé d’espace à gauche par Québec solidaire et le Parti québécois, à droite par le Parti conservateur du Québec, et la Coalition avenir Québec occupant le reste du spectre politique, le PLQ a du mal à se définir. «La politique, c’est extrêmement dur. Quand un parti se retrouve en situation de défaite, les couteaux volent bas. Quand une personne s’engage à la direction d’un parti, faut prendre en compte que le plafond peut vite te tomber sur la tête», abonde Patrick White.
Devant la grogne interne, Dominique Anglade a préféré partir. Mais «le parti qui périclite» se trouve devant un énorme défi: regagner un leadership fort, à seulement trois semaines de la rentrée parlementaire.