Québec dépose son projet de loi controversé sur la liberté académique
Le gouvernement Legault a déposé un projet de loi mercredi pour protéger la liberté académique universitaire. Les établissements devront se doter d’une politique à ce sujet dont les paramètres sont définis par Québec.
Le gouvernement définit la liberté universitaire comme «le droit de toute personne d’exercer librement et sans contrainte doctrinale, idéologique ou morale une activité par laquelle elle contribue, dans son domaine d’activité, à l’accomplissement de la mission d’un tel établissement d’enseignement».
La Commission scientifique et technique indépendante sur la reconnaissance de la liberté académique dans le milieu universitaire avait déposé un rapport au sujet de la liberté académique à l’automne dernier. Toutes les recommandations émises ont été adoptées.
Sans censure
Cette commission a été créée par le gouvernement Legault à la suite de plusieurs incidents fort médiatisés concernant l’utilisation de termes offensants en contexte universitaire. La suspension de Verushka Lieutenant-Duval par l’Université d’Ottawa pour avoir utilisé le «mot en N» en classe pour expliquer un concept a attiré l’attention des médias internationaux.
«Plusieurs événements troublants ont attiré notre attention sur le sujet, et ça m’a inquiétée, comme ministre de l’Enseignement supérieur», a avoué Danielle McCann en conférence de presse à l’Assemblée nationale, mercredi.
La censure, ça n’a pas sa place dans nos salles de classe, elle ne l’aura jamais, et on doit protéger le corps professoral de la censure.
Danielle McCann, ministre de l’Enseignement supérieur
En vertu du projet de loi, tous les mots pourront être employés dans une salle de classe dans un contexte pédagogique, dans le respect et «dans les normes de rigueur scientifique et éthique qui existent dans nos universités». Avant d’aborder un sujet délicat, les professeurs n’auront pas l’obligation de lancer un avertissement à leur salle de classe.
Réaction mitigée
Si le projet de loi est appuyé par une partie de la communauté universitaire, plusieurs professeurs sont plutôt sceptiques. La Fédération nationale des enseignantes et des enseignants du Québec (FNEEQ–CSN) salue l’adoption du projet de loi, mais s’inquiète encore de certaines mesures qui y sont proposées.
On critique notamment que le fait que la liberté universitaire n’ait pas préséance sur les autres obligations juridiques des enseignants. Ils se retrouvent donc exposés à des poursuites potentiellement excessives. En ce sens, on ne protège pas les chargés de cours, dont le statut d’emploi est précaire.
«Compte tenu de leur statut contractuel, session après session, plusieurs des chargées et chargés de cours que nous représentons avouent s’autocensurer afin d’éviter les controverses», commente la vice-présidente du syndicat, Christine Gauthier.
La fédération souhaite que le projet de loi soit étendu aux cégeps.