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Enquête sur les CHSLD: les travailleurs ont peur d’avoir une relation avec leur syndicat

infirmière

Une infirmière démotivée.

Les salariés qui travaillent dans des résidences pour aînés et des CHSLD privés ont peur d’avoir une relation avec leur syndicat par crainte de représailles de leur employeur, affirme la présidente du syndicat québécois des employées et des employés de service, section locale 298 de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ), Sylvie Nelson. 

C’est ce qu’elle a déclaré à la coroner Me Géhane Kamel mardi matin dans le cadre du volet national de l’enquête publique sur les décès survenus dans les CHSLD lors de la première vague de COVID-19

Mme Nelson a dépeint un tableau sombre des conditions salariales et de travail de ses 25 000 membres, dont une majorité travaille dans des établissements privés. 

Une «omerta» règne

Selon le témoignage de Mme Nelson, il y a une «omerta» qui règne dans le réseau.

Il y a tellement de travailleurs et de travailleuses qui ont peur. Ils ont peur de dénoncer quoi que ce soit. Ils ont peur, bien souvent, des gens qui dirigent à l’intérieur.

Sylvie Nelson, présidente du syndicat

Les salariés des CHSLD ont tellement peur de leurs employeurs que certains évitent même d’avoir une relation avec eux, selon la présidente du syndicat, Sylvie Nelson.

Pour démontrer que leurs craintes étaient fondées, la témoin a cité en exemple une situation qui s’est produite à Drummondville avec des membres.

«On est allés rencontrer les travailleuses et les travailleurs. Quand ils ont vu l’auto [du patron] arriver, ils se sont dit: “oh mon dieu, il ne faut pas que le boss nous voie ici”. Et ils étaient en pause café, ces gens-là», a raconté Sylvie Nelson. 

«Et après, les gens nous appelaient pour nous dire de ne pas revenir ici parce qu’il [l’employeur] est fâché. Il y a des conséquences», a-t-elle ajouté. 

Les exploitants des résidences privées pour aînés sont d’abord des promoteurs immobiliers, a aussi souligné Sylvie Nelson.

C’est des gens qui investissent dans le béton, mais il n’y a pas beaucoup d’investissements dans les soins et dans les services… le moins possible.

Sylvie Nelson, présidente du syndicat

Deux recommandations pour éviter les désastres

Sylvie Nelson était devant la coroner Kamel pour faire part de ses pistes de solutions afin d’éviter «d’autres désastres» comme celui vécu au printemps 2020 dans les milieux d’hébergement pour aînés. 

Pour une offre de soins et de services équitables dans tous les établissements du Québec, Mme Nelson recommande de conventionner tous les CHSLD. «En les conventionnant, ça permettrait aussi aux travailleurs d’avoir des conditions salariales et de travail plus respectables», a-t-elle mentionné. 

De plus, la présidente du syndicat estime qu’il est «primordial» d’instaurer un «décret de convention collective» dans le secteur de l’hébergement privé pour les personnes en perte d’autonomie. «C’est des conditions minimales qu’on demande pour ces gens-là, qu’il y ait un plancher intéressant, un plancher, je vous dirais, digne», a-t-elle expliqué. 

Le «décret de convention collective» est une convention collective étendue juridiquement qui lie des employeurs et des salariés, syndiqués ou non, travaillant dans un secteur d’activité spécifique dans une région donnée. «Les dispositions d’un décret sont d’ordre public et, en conséquence, on ne peut y déroger», a précisé Sylvie Nelson. 

Cette demande a été transmise au ministère du Travail en avril 2020, a-t-elle précisé. 

Imposition de la logique Santé publique

Mardi après-midi, la coroner Kamel a entendu le conseiller syndical responsable des dossiers nationaux à la Fédération de la santé et des services sociaux affiliée à la Confédération des syndicats nationaux (FSSS-CSN), Philippe Crevier.

En recommandant d’interdir l’utilisation du N95 sauf pour certaines interventions médicales générant des aérosol dans les 11 premiers mois de la pandémie, le Comité sur les infections nosocomiales du Québec (CINQ) a mis les résidents des CHSLD en danger, a fait valoir le témoin.

Cette décision était liée au manque de preuves scientifiques démontrant le risque de transmission de la COVID-19 par voie aérienne. 

«On expose donc les personne à l’inhalation des particules virales en ne leur offrant que des EPI inadapté au contrôle du risque de transmission aérienne. S’ils tombent malades, ils pourront transmettre la COVID aux personnes âgées, les masques médicaux n’étant pas étanches dans les milieux sans bonne ventilation», a-t-il expliqué. 

M. Crevier estime que le «principe de précaution» de la Santé et Sécurité au travail aurait du prévaloir. Or, «le CINQ a imposé son point de vue aux instances de Santé et Sécurité au travail», a-t-il déclaré.

Un an après le début de la pandémie, un jugement du Tribunal administratif du travail a tranché que les masques médicaux ne protègent pas adéquatement les travailleurs des zones chaudes et tièdes des CHSLD contre le coronavirus.

Néanmoins, le CINQ n’a pas changé de position, a précisé Philippe Crevier. Mercredi, trois médecins de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) témoigneront devant la coroner. 

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