Et si les chiens pouvaient nous aider à détecter la COVID-19?
Huit chiens ont été entraînés en une semaine à détecter la COVID-19 dans la salive ou les sécrétions de patients infectés. Résultat? Ils ont réussi la plupart du temps à identifier le coronavirus.
Utiliser l’odorat supérieur des chiens pour détecter la COVID-19 pourrait se révéler bien utile, notamment pour briser les chaînes d’infection et contrôler la pandémie.
D’ailleurs, l’homme fait déjà appel à leurs aptitudes dans les corps policiers, en matière de sauvetage, dans les aéroports, ou encore aux douanes.
Comme nous l’explique Sylvain Duchesneau, éducateur et comportementaliste canin, lorsqu’on entraîne un chien à détecter une substance, il faut commencer par isoler celle-ci (ici la COVID-19). Jusqu’à ce que le chien alerte de façon constante la présence de la substance.
On entraîne ensuite le chien à la «discriminer», indique l’expert, au travers d’autres échantillons qui ne contiennent pas cette substance.
«Si le chien alerte de façon constante les échantillons contenant le virus et jamais ceux qui ne le contiennent pas, il est considéré comme fiable», explique M. Duchesneau.
Des résultats prometteurs mais à compléter
Des chercheurs ont donc décidé de tester une poignée de ces super renifleurs. Seraient-ils capables de détecter la COVID-19?
Résultat: les chiens ont pu distinguer les échantillons d’individus infectés (positifs) et non infectés (négatifs) avec une sensibilité diagnostique moyenne de presque 83%.
Lors de la présentation de 1012 échantillons randomisés, les chiens ont atteint un taux de détection moyen global de 94%. Et ce, avec 157 indications correctes de positifs, et 792 rejets corrects de négatifs.
Ils ne se sont trompés que rarement avec 33 indications incorrectes de négatifs, et 30 mauvaises indications de positifs.
Cela dit, les chercheurs croient qu’il faudra pousser les recherches. Certaines voix, plus critiques, ont suggéré que l’étude utilisait trop peu d’échantillons de patients. Comme le rapporte Nature, les chiens pourraient apprendre à identifier l’odeur spécifique des échantillons plutôt que celle de la COVID-19.
Pour le comportementaliste Duchesneau, il faudrait en outre prendre en compte d’éventuelles variantes du virus.
«Il faut utiliser toutes [les variantes du virus] à l’entraînement. Si elles ont une constitution différente, il est possible que le chien fasse une erreur.»
-Sylvain Duchesneau, éducateur canin
Aussi, il précise qu’il ne se fierait pas pour sa part à un chien qui n’a qu’une semaine d’entraînement, comme c’est le cas ici.
«Son cerveau n’est pas assez conditionné pour être vraiment fiable, il peut faire des erreurs. C’est pour ça qu’il faut tester régulièrement les chiens détecteurs avec des échantillons de virus dont l’examinateur connaît la position mais pas le maître-chien.»
En effet, ce dernier peut influencer son chien involontairement!
Quel encadrement juridique au Québec?
Autre constat: l’idée de se servir des chiens pour lutter contre la pandémie impliquerait des obligations légales et éthiques.
Au Québec, il existe déjà un encadrement général, comme nous l’explique l’avocat Me Michaël Lessard, expert en droit animalier.
Depuis 2015, le Code civil du Québec établit que «les animaux ne sont pas des biens» mais «des êtres doués de sensibilités». De plus, la Loi sur le bien-être et la sécurité de l’animal prévoit également plusieurs protections juridiques. Dont l’obligation de s’assurer de la sécurité des animaux.
«S’ils tombaient malades de la COVID-19, on aurait alors l’obligation de leur fournir les soins nécessaires. On ne pourrait pas les mettre de côté.»
-Michaël Lessard, avocat
Par décret, Québec pourrait également décider d’apporter des précisions contextuelles au règlement concernant la sécurité des chiens et des chats.
Finalement, la loi stipule qu’il est interdit d’entraver le travail d’un animal d’assistance, quand il assiste un agent de la paix.
Dans notre contexte, on pourrait imaginer qu’une personne refusant de se faire «sentir» par le chien ou qui se mettrait en travers de son passage, pourrait être légalement tenue responsable.
Le risque d’une mise à mort massive
Enfin, une situation comme au Danemark où l’on a mis à mort des millions de visons infectés est-elle impossible à voir au Québec? Malheureusement non.
Il y a quelques exceptions, comme l’indique Me Lessard. En cas d’abattage à des fins agricoles, ou bien (possible ici) si l’on décidait de passer par des médecins vétérinaires.
En effet, si la loi limite la manière d’abattre les animaux, elle n’empêche pas leur abattage à proprement parler.