Paroles d'un combattant vert, entrevue avec Jacques Languirand
Jacques Languirand est porte-parole du Jour de la Terre depuis 2000. Avec Métro, ce combattant vert de la première heure a discuté environnement et prise de conscience personnelle.
En huit ans, comment la situation a-t-elle évolué?
À l’époque, les gens se demandaient si on ne battait pas le tambour pour rien. Aujourd’hui, les entreprises s’impliquent. Cette année, grâce aux bons résultats du programme pour inciter les gens à choisir la facturation en ligne, auquel ont participé les Caisses populaires Desjardins et Vidéotron, 200 000 arbres seront plantés. Ça aidera notamment a développer un réseau de corridors verts dans différents endroits du Québec.
Cette année, le thême du Jour de la Terre, ce sont les écomunicipalités. Pourquoi?
C’est à ce niveau qu’un très grand nombre de solutions peuvent être trouvées et que beaucoup d’aménagements peuvent être faits sans que cela soit forcément coûteux. Par exemple, réaménager les bords d’une rivière, ce n’est pas compliqué à mettre en place et les gens voient les résultats. On n’est pas dans l’abstrait comme au niveau gouvernemental, où les décisions sont longues à prendre… quand elles se prennent!
Trop parler d’environnement ne risque t-il pas de nuire à la cause?
Oui. Il y a d’ailleurs déjà une lassitude chez certains. En fait, on voit deux choses. Il y a des gens, environ 15 %, qui arrivent à un certain niveau de conscience qui fait par exemple qu’ils n’utilisent plus de sacs en plastique ou évitent de prendre la voiture si ce n’est pas nécessaire. De l’autre côté, on a environ 10 ou 15 % des gens qui se sont découragés ou qui sont réticents parce que ça exige un effort. Notez bien, ces chiffres n’ont rien de scientifique. Le seul instrument de mesure dont je dispose, c’est le pif!
Comment avez vous pris conscience de l’importance d’agir pour l’environnement?
Lors de l’Expo 67, à laquelle j’avais participé, on était complètement passé à côté de cette question. Mais lors d’une réunion avec certains des designers de l’Expo, quelque temps plus tard, pour en faire le bilan, je me rappelle que quelqu’un a dit : «Maintenant, le grand sujet, ça va être l’environnement». Je ne peux donc pas dire que j’ai eu un déclic, ça a plutôt été une prise de conscience graduelle, puis exponentielle. En 1971, après m’être remis sur patte, je suis retourné à la radio pour une nouvelle émission. J’ai fait venir beaucoup de livres sur l’environnement. Ça allait devenir l’un de mes principaux champs de recherche pour les années à venir.
Quels gestes accomplissez-vous au quotidien?
On a une petite voiture, toujours la même, qu’on vient de rafistoler pour qu’elle dure encore quatre ou cinq ans. On recycle, on composte, on baisse le chauffage la nuit… Ce sont de petits gestes niaiseux, mais qui sont utiles. J’adhère aussi au programme des paniers biologiques, c’est-à-dire qu’on finance, avec plusieurs autres personnes, un fermier en début d’année qui livre chaque semaine le fruit de sa récolte à un point précis pas trop loin de chez moi. Ces produits sont cultivés de façon très respectueuse de l’environnement.
Pensez-vous qu’on devra passer par la décroissance?
Éventuellement, oui, mais encore peu de gens sont rendus à cette étape, à peine
2 ou 3 %. Ceux-là sont plus conscients que les autres.