«Les pénitences» d’Alex Viens: la violence en héritage
Premier roman d’Alex Viens, Les pénitences dépeint avec justesse une relation père-fille marquée par la violence et fait entendre une voix puissante, pleinement assumée.
Dans ce récit à la cadence soutenue, Jules, 24 ans, rend visite à son père, Denis, un «vieux punk charismatique qui fait peur autant qu’il fascine», et qu’elle n’a pas vu depuis une dizaine d’années, afin de lui remettre une mystérieuse petite boîte.
Denis insistant pour que sa fille partage un repas avec lui, ce qui s’annonçait comme une brève rencontre s’étire finalement en une soirée forte en rebondissements. Les murs du petit appartement de Denis se refermant graduellement sur Jules, la tension augmente à mesure que sont réveillées les blessures d’une enfance et d’une adolescence marquées par le tempérament imprévisible du père.
Jules cherche toujours ses mots. Elle cherche les termes justes, ceux qui n’ont peur de rien, pas même de la vérité. Jules voudrait se doter d’un vocabulaire irréprochable, parce que celui qui lui a été légué trahit son héritage – le manque d’éducation, la pauvreté, la paresse.
Alex Viens, Les pénitences
Au fil de denses et courts chapitres rythmés par des dialogues incisifs, transmettant une puissante charge émotionnelle, Les pénitences explore avec nuance le thème complexe de l’héritage familial. Celui-ci s’inscrit sous le signe de la pauvreté et des relations abusives, comme l’illustrent de manière éloquente les retours en arrière, morceaux choisis du passé ajoutant de la profondeur à la dynamique père-fille conflictuelle mise en scène dans la trame narrative principale.
Dans ce roman aux allures de huis clos, l’écriture précise, presque crue, d’Alex Viens joue un rôle de premier plan, la violence et la pauvreté culturelle dans laquelle a grandi Jules se répercutant notamment dans les jurons et autres insultes que s’échangent les personnages.
Mais la langue ne témoigne pas que d’un legs; elle représente également, dans Les pénitences, la voie par laquelle une forme de libération, voire une catharsis, peut advenir. À l’image de Jules, qui «cherche les termes justes, ceux qui n’ont pas peur de rien, pas même de la vérité», Alex Viens parvient à nommer et à décrire avec précision toute la gamme d’émotions – la honte, la culpabilité, la colère, mais aussi quelques éclats de joie nostalgique – que traverse sa protagoniste en cherchant à se dégager de l’emprise étouffante du père.
Le roman Les pénitences, d’Alex Viens, publié aux Éditions du Cheval d’août, est offert en librairie.