Normand Marinacci témoigne devant la Commission municipale
Cité en déontologie municipale, le maire de L’Île-Bizard – Sainte-Geneviève, Normand Marinacci a témoigné, mardi, devant la section juridictionnelle de la Commission municipale du Québec (CMQ). Il aurait décidé personnellement des sanctions à imposer à un employé visé par une enquête du contrôleur général, favorisant ainsi abusivement les intérêts de ce dernier.
L’ex-coordonnateur de la sécurité publique de l’arrondissement, Vincent Harvey, aurait volé du temps et utilisé de façon abusive un véhicule de fonction selon une enquête du contrôleur général de la Ville de Montréal qui fut menée à la fin 2019.
M. Harvey, qui avait un horaire fixe de 15h à minuit, du lundi au vendredi, aurait notamment «réaménagé» son horaire afin d’arbitrer des parties de baseball lors des heures normales de travail.
L’enquête du contrôleur général suggère également que M. Harvey ne travaillait en moyenne que 6h12 par jour, soit moins que le total d’heures prescrites dans son contrat. L’enquête a aussi révélé que le cadre utilisait son véhicule de travail les fins de semaine ainsi que les jours fériés alors que ses conditions de travail ne le prévoyaient pas.
L’analyse des données du GPS du véhicule de travail de M. Harvey a démontré que 42% du kilométrage du véhicule était effectué pour des déplacements personnels alors que 56% du kilométrage était effectué afin de faire des aller-retours entre le domicile et le lieu de travail de M. Harvey.
Une proportion de 1,7% du kilométrage aurait été effectué pour la patrouille du territoire de l’arrondissement. M. Harvey se serait par ailleurs retrouvé en voyage à Toronto une journée où il était réputé être au travail.
Confrontation
Une fois qu’il aurait reçu copie du rapport du contrôleur général, le maire Marinacci aurait confronté M. Harvey.
«Il m’a dit que jamais il n’avait volé de temps et qu’il avait donné plus d’heures que dans le rapport. Selon lui, il réaménageait ses horaires selon les besoins de l’arrondissement. Je voyais bien qu’il était toujours disponible. Je me suis dit que sa version était crédible. Sauf qu’il a manqué de rigueur dans la façon de comptabiliser ses heures et de les expliquer», indique-t-il.
Selon le procureur de la CMQ, Dave Tremblay, le maire Marinacci aurait favorisé les intérêts de M. Harvey, en lui imposant uniquement des mesures administratives, notamment lui interdire d’utiliser un véhicule de l’arrondissement en plus de lui imposer un plan de gouvernance.
Les mesures imposées l’empêchent également de profiter d’une augmentation de salaire ainsi que d’un bonus salarial. M. Tremblay critique l’enquête qu’a fait le maire Marinacci une fois qu’il a reçu le rapport du contrôleur général.
«L’enquête de M. Marinacci n’est pas sérieuse. Il a posé des questions. Mais M. Marinacci ne voulait pas congédier ou suspendre M. Harvey et il a simplement accepté ses explications sans contre-vérification. Il n’était pas capable de vérifier qu’il faisait effectivement ses heures de travail. Il l’a cru sur parole alors que les faits démontraient autre chose», soutient-il.
Pouvoir exécutif
Le procureur de la CMQ, Me Dave Tremblay, soutient que le maire a, dans le cadre de ses fonctions, le droit de surveillance, investigation et contrôle, mais il n’a pas celui d’exécutant.
«Ce n’est pas le rôle de M. Marinacci d’agir comme décideur, d’agir comme ça en ressources humaines. Il ne s’est pas mêlé de ses affaires. Ce n’est pas sa responsabilité de décider de la sanction à imposer à un employé. C’est le rôle du conseil», explique-t-il.
De son côté, Me Jean-Jacques Rainville, l’avocat de M. Marinacci, insiste que c’est la direction de l’arrondissement qui a sollicité l’intervention du maire d’arrondissement dans le dossier.
«On prétend qu’il s’est ingéré. C’est faux. Il a été sollicité pour intervenir dans le dossier en vertu des pouvoirs qui sont les siens dans la loi comme chef exécutif de l’administration municipale», avance-t-il. Il n’est pas une marionnette de l’administration centrale de la Ville de Montréal. Il ne doit pas être à la solde du bureau du contrôleur général».
Le juge administratif Joseph-André Roy devrait rendre une décision quant à cette affaire d’ici 90 à 120 jours.