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Joyce Echaquan: un «fossé» entre le personnel et les Atikamekws à Joliette

Photo: Capture d'écran

Depuis le décès de Joyce Echaquan, le «fossé» entre le personnel soignant et les patients atikamekws s’est creusé davantage, selon une préposée aux bénéficiaires qui témoignait mercredi dans le cadre de l’enquête publique visant à élucider les causes et les circonstances de la tragédie.

Cela fait maintenant près d’une semaine que défilent les témoins à la barre au palais de justice de Trois-Rivières. Que s’est-il passé entre le moment où Joyce Echaquan est calme et celui où elle est «en crise» à un point tel qu’il faut la contentionner aux quatre membres?

Plus l’enquête avance, plus on s’approche du cœur des évènements. La préposée aux bénéficiaires qui a témoigné mercredi matin ne s’explique toujours pas la raison de l’escalade. «Il s’est passé de quoi entre 8h15 et 10h15, mais je ne peux pas vous dire quoi…», a-t-elle déclaré à la barre.

La femme de 47 ans travaillait le matin du 28 septembre, jour du décès de Joyce Echaquan. Lorsqu’elle l’a vue en matinée, la patiente parlait au téléphone et semblait tout à fait normale. À son retour de pause, Mme Echaquan criait à genoux dans sa civière en se tapant la tête sur le mur, a-t-elle relaté.

«C’est comme si elle était totalement une autre femme», a affirmé la témoin dont l’identité est protégée par une ordonnance de non-publication. 

Un plus grand «fossé» depuis

À la barre, la préposée aux bénéficiaires a déclaré d’emblée que la relation entre les membres du personnel de l’hôpital de Joliette et les Atikamekw s’était dégradée depuis la mort de Joyce Echaquan.

Si le fossé était déjà présent, il s’est creusé «encore plus» depuis le 28 septembre, selon elle. «Je pense que les gens ont peur de nous. […] Ce n’est pas normal qu’une personne qui vient se faire soigner ait peur de se faire soigner», a-t-elle souligné.

Par ailleurs, celle qui travaille à l’hôpital de Joliette depuis 20 ans estime que les «deux parties ont peur». En effet, l’employée dit craindre de faire quelque chose de mal sans le savoir en raison de la barrière linguistique.

«Je ne la comprend pas leur langue. Je ne sais pas ce qu’ils disent. Ce qui me passe par la tête c’est ‘sont tu en train de parler de moi? Il y a tu quelque chose que je fais de pas correct?’ C’est le langage qui était plus difficile…», a-t-elle expliqué.

«C’est désolant, ça a pris la mort de quelqu’un pour qu’il y ait quelque chose qui bouge, mais ça fait longtemps qu’on en parle» – Préposée aux bénéficiaires, témoin à l’enquête publique

Selon une autre employée, une infirmière qui a témoigné mardi matin, des préjugés étaient véhiculés sur la communauté Atikamekw entre collègues.

Questionnée à ce sujet, la témoin a confié qu’il se pouvait que cette clientèle soit négligée par certains employés. «J’ai l’impression qu’on banalise leur souffrance et leur mal d’être quand ils arrivent à l’urgence», a-t-elle déclaré.

Une barrière linguistique et culturelle

La témoin reconnaît que les Autochtones sont méfiants de recevoir des soins de santé en raison d’une barrière linguistique, mais aussi d’une différence culturelle. 

«Je pense que si il s’est produit plusieurs petites affaires à plusieurs petites personnes, ça devient une montagne et là, la montagne est pleine», a-t-elle illustré. 

C’est pourquoi la préposée aux bénéficiaires souhaite recevoir davantage de formation sur comment mieux prodiguer des soins à la communauté. «C’est quoi leurs peurs? Pourquoi ils ont peur moi? Pourquoi ils ont peur de venir se faire soigner? C’est ça que je veux comprendre. Il y a moyen qu’on puisse se comprendre et qu’on soit capable tous les deux de communiquer», a-t-elle mentionné.

Par ailleurs, la témoin indique qu’il est «difficile» de joindre l’interprète culturelle atikamekw, Barbara Flamand, à l’hôpital de Joliette, surtout depuis que son bureau n’est plus sur place. Selon elle, il en faudrait plus qu’une.

Mardi, deux infirmières ont affirmé qu’elles n’avaient pas connaissance qu’une ressource autochtone était disponible à l’hôpital avant le 28 septembre. 

L’enquête publique, dont les audiences se tiendront jusqu’au 2 juin, se poursuivent aujourd’hui alors que les infirmières qu’on peut entendre dans la vidéo tournée par Joyce Echaquan devraient témoigner.

 

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