La préparation aux inondations à Montréal au temps du coronavirus
Alors que des précipitations sont attendues au Québec dans les prochains jours, la menace d’inondations plane sur Montréal. Des préoccupations qui sont exacerbées par la crise du coronavirus qui fait rage dans la métropole.
Les données du ministère de la Sécurité publique indiquent que le niveau d’eau est en hausse au lac des Deux-Montagnes. À Sainte-Anne-de-Bellevue, on fait état d’«inondations mineures».
La prudence est d’ailleurs de mise alors que des précipitations sont à venir dans les prochains jours dans plusieurs secteurs de la province. Déjà, en mars, une quantité record de pluie est tombée.
«Il faut s’attendre à ce que le niveau d’eau continue d’augmenter», analyse le spécialiste hydraulicien à la Communauté métropolitaine de Montréal, Pierre Dupuis. Déjà, le niveau d’eau du lac des Deux-Montagnes est un mètre plus élevé qu’à la même période, l’an dernier, note l’expert.
Ainsi, tout va dépendre de l’ampleur des précipitations dans les prochains jours. «Le gros problème, l’an dernier, c’est qu’il y a eu deux grosses tempêtes à la fin du mois d’avril […] C’est là que c’est moins drôle», soulève l’expert.
Préparation bien avancée
Les maires des arrondissements et villes liées grandement affectées par les crues printanières de 2017 et de 2019 assurent à Métro avoir tiré des leçons en faisant l’acquisition en amont de différents matériaux, comme des sacs de sable, des pompes submersibles et des murets.
«Cette année, on a été proactif. On a fait venir des ballons et 24 pompes. On a déjà fait venir un chargement de sacs de sable», indique le maire de L’Île-Bizard–Sainte-Geneviève, Normand Marinacci.
La crise du coronavirus vient toutefois complexifier la préparation aux inondations. Des maires craignent notamment pour la sécurité des cols bleus et des bénévoles qui viendront porter main forte pour empiler des sacs de sable si le niveau d’eau atteint un point critique.
«Il faudra voir comment on va travailler avec les bénévoles. Je ne veux pas les mettre en danger en raison de la COVID», soulève M. Beis. Ce dernier indique être en pourparlers avec la Ville et le réseau de la santé afin de pouvoir fournir des équipements de protection individuels, comme des masques et des visières, aux bénévoles et aux employés qui affronteront les inondations.
«Ça peut être une difficulté pour avoir des bénévoles. Ça peut être difficile aussi au niveau des effectifs pour les cols bleus parce qu’ils pourraient être mobilisés ailleurs.» -Normand Marinacci, maire de L’Île-Bizard–Sainte-Geneviève
Protocoles de sécurité
Questionnée par Métro mercredi, la directrice régionale de la santé publique de Montréal, Mylène Drouin, a indiqué que des protocoles sont en cours de rédaction pour déterminer les mesures à prendre afin que les travaux de construction des digues «puissent se faire de façon sécuritaire».
«C’est clair que s’il y a du matériel de protection nécessaire, on va regarder l’ensemble des procédures de travail pour s’assurer que ce soit sécuritaire pour l’ensemble des gens qui vont y collaborer», a-t-elle dit.
La distanciation sociale viendra aussi compliquer les évacuations de résidences, le cas échéant. Déjà, Québec a indiqué le mois dernier que les villes n’auront pas l’autorisation d’ouvrir des centres d’hébergement pour sinistrés en raison de la crise du coronavirus.
«Si des personnes sont dans une maison inondée, il y a aussi la question de savoir comment on va les évacuer», soulève la mairesse de Sainte-Anne-de-Bellevue, Paola Hawa.
Anxiété accrue par le coronavirus
La professeure agrégée à l’Université Sherbrooke au département des sciences et de la santé communautaire, Mélissa Généreux, s’inquiète des impacts combinés de la crise du coronavirus et d’éventuelles inondations sur la santé mentale de nombreux Québécois.
L’experte a co-rédigé une étude analysant les impacts psychosociaux des inondations de 2019 sur 3437 résidents de six régions affectées par celles-ci, dont Montréal et Laval. Celle-ci souligne que 44% des personnes inondées «éprouvent des symptômes modérés à élevés de stress post-traumatique».
«Ces gens avaient déjà un stress financier et là, on leur ajoute un stress relié à la pandémie. J’ai une préoccupation particulière pour ces gens-là», souligne Mme Généreux.