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Interdiction du plastique à usage unique: un processus «complexe»

plastique à usage unique sur le bord de la rue
«Le meilleur déchet est celui qui n'existe pas», explique Clélia Sève, coordonnatrice de la Maison de l'environnement de Verdun. Photo: Josie Desmarais/Métro

Après plusieurs municipalités comme Montréal et Victoria, c’est maintenant au gouvernement fédéral d’interdire le plastique à usage unique.

Le gouvernement Trudeau a annoncé lundi qu’il interdira ce type d’objets, et ce, dès 2021.

Les pailles, les sacs, les ustensiles, les contenants pour emporter en plastiques pourraient donc disparaitre prochainement au Canada.

Pour comprendre l’ampleur de la tâche qui attend le gouvernement fédéral, Métro a discuté avec Jordan Keenan, coordonateur de la branche québécoise de l’organisme Plastic Oceans Canada.

Est-ce qu’on utilise plus de plastique au Canada que dans d’autres pays ? 

Le Canada est un pays plus sensible aux questions environnementales que les États-Unis, mais les gens vivent encore dans une culture de complaisance où on préfère prendre l’option la plus simple. On utilise plus de 2,86 milliards de sacs de plastique par année. Le plastique à usage unique ne devrait pas être quelque chose qui est nous est automatiquement donné. Nous devons réévaluer ce que le plastique signifie pour nous. C’est une chose qui a de la valeur: on peut le recycler, le transformer, ça coûte de l’argent à produire. Donc, il devrait y avoir un obstacle pour l’obtenir.

Comment cette loi va-t-elle changer les habitudes de vies des consommateurs ? 

Les gens n’utilisent pas le plastique parce qu’ils le veulent, mais parce que c’est une option moins chère. À Montréal il y a plusieurs épiceries zéro déchet, mais comme elles sont dans un marché très niché, elles ont tendance à être plus dispendieuses que les autres épiceries où tous les produits sont emballés avec du plastique. Même si le plastique coûte de l’argent, on nous le donne tellement facilement que c’est difficile de s’en débarrasser. En éliminant l’utilisation des plastiques à usage unique, en créant des obstacles à leur utilisation et en mettant des alternatives en premier plan, nous allons y penser deux fois avant de les utiliser. De plus, lorsqu’on s’attaque à la pollution plastique, cela a un effet de ricochet sur notre conscience environnementale. Ça nous permet de penser à notre « culture du jetable », et donc d’être plus sensibles à nos habitudes de vie.

Quels sont les obstacles à l’interdiction du plastique à usage unique au rang national ?

L’interdiction du plastique est complexe. Les industries produisant du plastique à usage unique sont très organisées pour limiter leurs interdictions. À Victoria, l’Association canadienne des sacs de plastique est en lutte juridique pour empêcher la Ville de bannir les sacs de plastique. À New York, lorsqu’une loi interdisant les contenants en plastique a été introduite, les industries produisant du plastique ont réussi à renverser l’interdiction. À Montréal, la Ville interdit les plastiques à usage unique depuis le mois de janvier, mais il n’y a toujours pas de pénurie de sacs de plastique. La question ici est de savoir comment une telle interdiction sera imposée aux industries. Elles ont des structures économiques importantes et devront s’adapter pour donner aux consommateurs d’autres options que le plastique à usage unique.

Est-ce réaliste d’interdire le plastique à usage unique au Canada d’ici 2021 ? 

Le gouvernement doit encore nous informer sur quels plastiques à usage unique seraient inclus par cette interdiction, mais je pense que ça va être difficile que faire ça d’ici deux ans. On espère que les industries produisant du plastique seront coopératives dans le cadre de ce projet et vont s’efforcer de trouver des solutions viables au lieu d’être destructif et de se laisser emporter par des poursuites judiciaires.

Vivons-nous une crise du plastique au Canada ? 

Je pense que oui. Le plastique est relativement nouveau, il n’existe que depuis 1950. On le tient pour acquis sans être responsable de ce qui lui arrive après notre utilisation. Pendant longtemps, on a pensé que le recyclage était une bonne option. Maintenant, on commence à voir qu’on nous renvoi nos déchets plastiques qui ont été envoyés dans des pays asiatiques. De plus, plus de 8 millions de tonnes de plastique sont déposées dans nos océans chaque année. Le recyclage devrait être notre dernier effort.

Quels sont vos conseils pour limiter notre utilisation de plastique à usage unique ? 

Lorsque vous avez la possibilité de prendre un morceau de plastique, vous devriez vous demander : «Est-ce que je vais seulement l’utiliser pendant les prochaines 24 heures ?». Si la réponse est oui, vous n’avez probablement pas besoin de ce plastique. Ça serait un inconvénient mineur, mais ça ne va pas gâcher votre vie pour autant. Si vous allez l’utiliser pendant longtemps, c’est peut-être une bonne utilisation. Donc, réfléchissez aux 3 R : la réduction de votre utilisation de plastiques à usage unique, la réutilisation du plastique et finalement le recyclage du plastique.

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