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Pokémon Go: attrapez-les tous… À quel risque?

Photo: Felix O.J. Fournier/TC Media

Ces derniers temps, pas une semaine ne passe sans que les médias ne relaient un incident relié au jeu Pokémon Go. L’application comporte-t-elle réellement un danger? Distraie-t-elle plus l’utilisateur que les autres fonctionnalités du téléphone intelligent? Ce sont les questions que s’est posée l’équipe de chercheurs du Tech3Lab, un laboratoire de HEC Montréal.

Le 18 août, ils ont mené une étude sur vingtaine de participants au Vieux Port de Montréal, afin de mesurer leur attention et leur champ de vision pendant le jeu.

«Chaque participant doit effectuer trois tâches au cours de l’expérience, explique le directeur du Tech3Lab, Sylvain Sénécal. Ils doivent marcher 10 minutes en jouant à Pokémon, 10 minutes en jouant au même jeu avec l’option réalité augmentée, et six minutes en textant. On veut voir si le niveau d’attention diffère d’une activité à l’autre.»

Modus operandi
La tête tournée vers son téléphone portable, Théo, un des cobayes de ce test, avance d’un bon pas sur le passage qui mène au Quai de l’Horlorge. Il s’arrête, effleure l’écran de son index. Après quelques secondes, il reprend son chemin, un Pokémon de plus dans sa collection.

Sur sa tête, un casque électro-encéphalogramme et des lunettes oculométriques analysent son activité cérébrale, et enregistrent tous les endroits où ils regardent et le temps qu’il passe les yeux rivé sur son écran versus sur son environnement.

Pendant ce temps, un jeune homme devant lui tient dans sa main une pancarte sur laquelle figure la lettre S, peinte en blanc sur un fond rouge. Il lève l’affiche à quelques mètres devant Théo. Il répétera l’exercice à quelques reprises au cours des trente minutes que dureront l’expérience, avec différentes lettres et différentes couleurs.

«La lettre est maintenue en l’air pendant cinq secondes, souligne David Brieugne, gestionnaire de projets en recherche utilisateur. Après l’expérience, les participants se souviennent parfois avoir aperçu des lettres, mais ne peuvent les nommer correctement. Dans d’autres cas, ils ne les voient pas du tout. Cinq secondes, disons que c’est suffisant pour manquer un feu rouge.»

Texter vs jouer
Il y a quelques mois, le laboratoire du HEC avait publié les résultats d’une importante recherche sur les effets et les dangers de texter en marchant. Les chercheurs avaient démontré que les risques de collision augmentaient de 30% chez les personnes distraites par leur téléphone.

«On observe que lorsque la personne lève la tête et regarde au loin, son cerveau est toujours concentré sur son téléphone, remarque Pierre-Majorique Léger, co-directeur du laboratoire. Le temps de réaction est donc considérablement ralenti. Avec Pokémon Go, on peut supposer que les joueurs sont encore plus immergés dans leur partie.»

Théo voit pour sa part une différence dans son niveau de concentration au cours des trois activités. «Je me rends compte que quand je texte, mon attention est presque toujours sur mon téléphone. Je n’ai vu qu’une seule lettre affichée pendant cette étape. Quand je joue, je lève plus souvent la tête, je regarde ce qui se passe autour.»

Grâce à ses recherches, le Tech3Lab espère pouvoir informer et sensibiliser la population autant que les développeurs aux risques liés au téléphone intelligent.

« Les informations peuvent amener les villes à mettre en place des mesures préventives pour diminuer les risques. Peut-être un peu trop tard dans son développement, Pokémon Go a ajouté des alertes quand on se trouve en voiture, pour rappeler au conducteur qu’il n’est pas prudent de jouer au volant. Ça doit devenir un réflexe chez les développeurs», poursuit M. Léger.

Les résultats de l’étude de HEC Montréal devraient être rendus publics au cours des deux prochains mois.

Depuis sa sortie le 6 juillet, l’application Pokemon Go a été téléchargée plus de 30 millions de fois dans le monde et a généré des revenus de plus de 35 millions $ à Nintendo.

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